Il faut bien le dire, le débat qui s’est ouvert sur le mariage pour tous (et avec quelle mauvaise foi, les opposants du projet osent prétendre le contraire !) n’aura pour l’instant pas été à la hauteur. La raison en est simple : les partisans du projet ont tout simplement délaissé l’espace médiatique.
Les opposants eux veillaient au grain. Dès juin, Christine Boutin, la bigote qui radote le PaCS et le sulfureux Alain Escada pour la très tranquille association Civitas avait ouvert le feu. Depuis, ils sont nombreux à avoir exprimé leur point de vue : Ivan Rioufol, Monseigneur Vingt-Trois, Monseigneur Barbarin, François Lebel, Alain Juppé, François Fillon, Jean-François Copé, Marine Le Pen, l’UOIF, le Grand rabbin de France Gilles Bernheim, Eric Zemmour, Philippe Ménard, Frigide Barjot, Xavier bongibault… La liste n’est pas exhaustive et donne le tournis.
Un mépris persistant
Dès que le micro est brandi et la caméra au poing, les opposants donnent de la voix. Et, bien évidemment, se défendent de toute homophobie. Car évoquer pêle-mêle l’inceste, la zoophilie, la pédophilie, la polygamie, la nature, l’altérité, la déstructuration de la société, faire des jeux de mots tels que "Non à l’homofolie", ne sont en rien montrer du mépris à l’égard des homosexuels...
En revanche, plus discrets sont ces hérauts du "NON" au mariage et l’adoption pour tous dès lors que les auditions commencent… Pourquoi participer vraiment au débat quand le tumulte, la fureur et le capharnaüm médiatique portent à merveille leur message ?
Pendant ce temps, qu’ont fait les partisans du projet ? Force est de constater que certains ont brillé par leur absence. Ou presque. Ont-ils cru trop vite que le projet allait passer sans l’ombre d’un doute fort de sondages favorables ? Toujours est-il que cet excès de confiance pourrait laisser des traces à l’arrivée. Car, au moment du sprint final, les opposants ont indéniablement un coup d’avance.
Couacs
Et, parmi ces partisans, le PS, qui avait pourtant porté ce projet à bout de bras tant à la présidentielle qu’aux législatives, a fait la carpe pendant de nombreuses semaines. Et pour cause : la première sortie à la rentrée se solda par une catastrophe. Christiane Taubira grilla clairement la politesse à Marisol Touraine et Dominique Bertinotti, cette dernière devant se justifier comme elle le put sur le plateau de Laurent Ruquier. Une source me confiait il y a peu que la rédaction de "La Croix", qui avait organisé l’interview, n’avait pas vu le coup venir…
Après ce qu’il convient d’appeler un couac du gouvernement, vint celui du président lui-même, lui qui, selon Nicolas Domenach dans de nombreuses interventions dans l'émission "La Nouvelle édition" le midi sur Canal Plus, ne cessait d’exprimer ses doutes grandissant sur l’opportunité de légiférer en ce moment. Arriva ce qui devait arriver lors du Congrès des maires. Certes, François Hollande revint en arrière mais désormais les partisans du projet commencèrent eux-mêmes à douter des velléités de celui qu'ils pensaient être l’homme de la situation.
L'offensive
Aussi, le PS a décidé de passer à l’offensive. Histoire de casser la spirale infernale.
Après le succès en nombre des manifestations du week-end du 17 et 18 novembre, les partisans du projet ont décidé d’organiser eux aussi une immense manifestation, dimanche prochain le 16 décembre. Et le PS de devenir le héraut de la manifestation.
Entre temps, Bernard Roman, déjà artisan du projet du Pacs, a lancé un manifeste de 100 députés en faveur de la PMA, que semblait avoir laissé sur le carreau Christiane Taubira. Une initiative courageuse alors que l’adoption elle-même semble en danger. Le député PS de la première circonscription du Nord que j’ai rencontré cette semaine m’expliquait en avoir pris "plein la tête" depuis la parution de la tribune. L’air amusé et gêné, d’un petit polisson qui aurait pu commettre une bêtise. Mais l’homme est de conviction et d’un air généreux, il m'a confié: "Je ne lâcherai pas. C’est vraiment un beau projet que cette loi. J’y tiens vraiment". Les partisans du projet savent qu'ils pourront compter sur lui dès le 29 janvier.
La riposte
Valérie Trierweiler, elle, a tenté, autant qu’elle le put, de rectifier la bourde de son compagnon en déclarant vouloir être témoin d’un des premiers mariages qui unira deux homosexuels. Une initiative conspuée par l’UMP. Mais il faut dire que la moindre expiration nasale de la femme au tweet tueur est assimilée à une prise de position inacceptable de la part des tenants de l’autre rive bipartite.
Enfin, cette semaine, le PS a décidé de riposter avec les méthodes des opposants au mariage pour tous, qui n’hésitent plus à transmettre les mails des députés qui croulent sous des milliers de mails par jour déclamant par homélies redondantes leur farouche déclaration de guerre. Des méthodes qui rappellent SOS éducation. Qui rappellent elle-même celles d’Avenir de la Culture. Pratiques de l’intégrisme par excellence. Une pétition pour sensibiliser les citoyens.
Puisque la raison, les sondages, et les programmes votés ne suffisent plus, autant se mettre au niveau de leurs adversaires : la pétition ! Jacques Bompard qui peine à atteindre les 2100 signatures (certes d’élus, mais si loin des 15.000 signatures de maires de la pétition de Michel Pinton de 1999) pourra toujours faire œuvre de comparaison.
Un manifeste pour la PMA, l’engagement de la compagne du président de la République, une pétition et surtout une grande manifestation le 16 décembre ? Cette fois-ci, c’est certain, les partisans du projet sont dans l’arène. Le débat avait commencé. Place au combat.