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18 septembre 2011 7 18 /09 /septembre /2011 19:39

Université d’été. Un passage obligé pour les militants. Un marronnier pour les journalistes. Une tribune pour faire de l’image pour les citoyens. Chaque année entre la fin août et la mi-septembre, les partis politiques se réunissent pour ouvrir la saison. Une véritable réunion de famille avec ses fêtes, ses conflits ou ses tensions.

Les Universités de rentrée portent pourtant en leur sein, leur nom, une promesse : celle du travail et de la réflexion. Et en cette année qui précède la présidentielle, l’esprit est à la profusion d’idées. D’espoirs. Ou même de rivalité. Et puis il y a l’incontestable envie de montrer ses muscles saillants, prêts au combat. L’unité faisant la force, le nombre la transcende. L’UMP et le PS se sont engagés dans une compétition sans merci. C’est dire si l’enjeu est de taille.

Le MoDem ouvre les siennes ce week-end à Giens. Pas de scoop à l’horizon : François Bayrou a déjà officialisé sa candidature à la présidentielle. Mais déjà entend-on l’anathème tel un hymne qui l’a poursuivi durant cette lustre : Bayrou est seul. Il n’a pas ou plus de troupes. Ses amis l’ont délaissé. Paillé, le porte-flingue de Borloo, est de ceux-là au point d’imaginer sombres fantaisies que seul un esprit inquiet pouvait produire. Bayrou isolé, ce que du reste il disait déjà en 2009 quand il roulait pour Sarkozy. Changez le paysage, la route reste la même. Celle de François Bayrou s’est apparentée à un désert… qu’on lui avait promis. Les Européennes eurent pu servir de gourde. Las elles finirent en eau-de-boudin.

On disait l’homme seul sans ressources. Il s’en explique d’ailleurs dans 2012 Etat d’Urgence : "On m’a dit seul. C’était faux. Mes amis, les vrais, mes compagnons d’âme et de combat, les vrais, ne m’ont jamais manqué. Mais être taxé de solitude, c’est plutôt bon signe".

Et le Béarnais d’admettre :

"Une seule chose difficile, c’était de ne pouvoir me faire comprendre de ceux qui avaient partagé mes combats"

Mais le Président du MoDem n’est pas du genre à se désespérer :

"Mais à mes compagnons qui ne me suivaient pas, qui ne me comprenaient pas, je n’en ai pas voulu […] J’ai toujours cru qu’une fois le chemin fait et les écailles tombées des yeux, nous nous retrouverions, bien contents"…

 

Le moment est-il arrivé plus tôt que prévu ? C’est ce que l’on serait en droit de croire à l’entendre. Le mot ralliement, utilisé par le journaliste, peut paraître exagéré. Mais ces rapprochement,s même pour dialoguer et construire ensemble une pensée pour une majorité nouvelle sont d’importance. Quand certains s’enorgueillissent de soutiens sulfureux et d’autres s’improvisent leaders syndicalistes pour remplir par la chimère l’écho d’une salle si vide, François Bayrou voit là ses espoirs se réaliser. Celui de la fin de la vision partisane, comme il l’explique dans son dernier livre :

"Un jour ou l’autre, la nécessité fera passer le projet avant toute considération d’étiquette."

Une reflexion aux antipodes de l’ouverture Sarkozyenne, aux allures de débauchage, ou au ralliement socialiste, qui à entendre le premier débat des primaires, ne se ferait que sur le base de leur projet, sans remise en question… et au 2ème tour histoire de garantir la victoire.

La démarche du Modem est tout autre. Singulière. Et surtout la seule qui puisse affronter la crise, comme l’explique François Bayrou dans son livre :

"L’union nationale suppose que l’on embarque tout le monde."

Et d’en déduire : "Quand on sait que des efforts devront être consentis, chacun des citoyens doit avoir la certitude que les décisions prises ne seront ni partiales ni partisanes, qu’elles ne serviront ni intérêts de groupe, de classe ou d’idéologie. Le pluralisme de la majorité garantira que les décisions seront nécessairement d’intérêt général."

L’exemple le plus frappant reste la participation de Jean Peyrelvalde, haut fonctionnaire, qui soutint le président de l’UDF d’alors, et qui, en 2011, rejoindra l’Université d’été de Giens pour soutenir François Bayrou tout comme il peut par ailleurs soutenir François Hollande. Pour le service des Français avant tout.

Mais il n’est pas le seul. Jean Arthuis, sénateur et président de la Commission des Finances, qui participe lui aussi à l’Université de rentrée du MoDem après avoir accueilli François Bayrou au congrès de l’Alliance centriste.

Seul, François Bayrou ? Alors citons ceux qui ont décidé de soutenir la démarche du président du MoDem pour construire un projet pour les Français et non pour un parti : proches d’Arthuis, François Zochetto et Philippe Folliot, membres de L’Alliance centriste ont quant à eux participé à l’inauguration du siège rénové du Mouvement Démocrate le 22 juin dernier, le dernier cité manifestant depuis régulièrement son soutien sur Twitter.

Michel Mercier, pourtant Ministre de Nicolas Sarkozy et qui a voté pour la réélection de François Bayrou à la présidence de l’UDF en janvier dernier s'est rapproché de ami de trente ans malgré l'opposition opiniâtre et indélébile au président sortant incarné notamment dans Abus de pouvoir. Sans oublier Bernard Bosson, qui a annoncé se mettre au service de François Bayrou pour la présidentielle de 2012.

Et François Bayrou serait donc desservi par le centre ?

 

À Droite, les modérés ne se retrouvent plus dans l’UMP. Pierre Méhaignerie, qui sera présent à l’Université de rentrée du MoDem et déclarait dans Ouest France lundi 12 septembre "mes liens d’amitié avec François Bayrou sont restés étroits et les différences sont faites pour être surmontées".

Alain Lambert a, lui,  profité du congrès de l’ARES pour affirmer via Twitter son soutien au président du Mouvement Démocrate : "Présidentielle 2012 - Borloo &Morin se disputent parait-il le Centre. Qu'ils laissent donc la place à F. Bayrou la question sera réglée" Il prépare d'ailleurs un billet pour son blog consacré au dernier livre de François Bayrou.

Anne-Marie Idrac, ancienne secrétaire générale de l’UDF, porte-parole de François Bayrou à la présidentielle de 2002… qui revient à ses côtés dans le Var.

Chez les Verts, la cause est entendue depuis longtemps, puisque deux anciens leaders garantissent la place de l’écologie au sein du MoDem : Yann Wehrling et Jean-Luc Bennahmias, tous les deux prédécesseurs de Cécile Duflot, qui ont rejoint François Bayrou dès 2007 et font de l’écologie l’une des fondations du MoDem.

Et la gauche diront certains ? N’oublions pas que l’appareil est verrouillé par la primaire. Beaucoup, en off, selon mes sources auprès du siège, ont confié qu’ils sont prêts à travailler avec François Bayrou dans le cadre d’un contrat de Gouvernement, comme Jean-Michel Baylet qui proposait même une alliance à la veille des élections européennes, que François Bayrou avait refusé faute d’un gage fort d’indépendance… Mais le 16 octobre ouvrira des portes, quand on se rendra bien compte que le candidat PS portera un projet que seul Jean-Pierre Foucault serait à même de financer, à en croire un Sarkozy qui n’a pas perdu son sens de l’humour malgré des sondages en berne. Rappelons qu'en 2007, bon nombre de cadres de Gauche avaient rallié le Béarnais...

 

Sur le terrain éducatif, pierre d'angle du projet révélé par Bayrou dans son dernier livre,  Jean-Paul Brighelli sera présent à l’Université de rentrée du MoDem, comme il y a trois ans, lui qui signait ces jours-ci un billet penchant clairement en faveur de François Bayrou.  Mérieu en sera pour ses frais. Il sera accompagné de Claire Mazeron et de Frédérique Rolet.

Sur le volet, économique, outre Jean Gilles Le Blanc sera présent.

Pour le sport, dans une génération qui n’adhère plus au système Droite Gauche, citons Jérémie Janot, qui a officialisé son soutien à Bayrou lundi 12 septembre, via Twitter ou encore Marouane Chamakh, proche de Jean Lassalle, candidat aux régionales de 2010 sur lesquels Bayrou pourra compter pour la Présidentielle.

L’Europe ne sera pas oubliée à Giens avec la venue de Guy Verhofstadt, président de l’ADLE, figure parmi les plus reconnues du Parlement européen et ami de longue date du Président du MoDem, ou encore Francesco Rutelli, ancien maire de Rome et ministre de la Culture italien, qui incarne le Centre en Italie depuis de nombreuses années sans oublier Pat Cox, ancien président du Parlement européen. Jean-Claude Juncker, premier ministre luxembourgeois, a lui depuis longtemps témoigné de son amitié de longue date qui le lie à françois Bayrou.

Pour parler du social, outre Robert Rochefort, ancien directeur du CREDOC, économiste éminent, qui a rejoint François Bayrou en 2009 à l’occasion des élections européennes, seront accueillis Patrice Ract-Madoux et Dominique Versini, ancienne Défenseure des enfants, fonction aujourd’hui reléguée à celle d’adjoint du Défenseur des droits, réforme combattue vivement par François Bayrou.

Parmi les Intellectuels et autres hommes de culture salué n’oublions pas Jean-François Kahn et Philippe Meyer, qui ont même été candidats du MoDem aux régionales pour l’un et aux municipales à Paris pour l’autre, Jean-Pierre Rioux et Jean-Claude Casanova.

Enfin la justice ne sera pas en reste avec Philippe Bilger, qui signait un beau billet sur son blog au sujet de Bayrou il y a quelques mois, Pierre Albertini, professeur des universités et ancien député-maire de Rouen, spécialiste du Droit public, Thomas Clay, doyen de la faculté de Droit de Versailles et spécialiste en Droit privé et Christophe Regnard, président de l’Union syndicale des magistrats (USM), qui tous seront à L'université d'été qui se tient ce week-end.

 

Et après on dira que François est encore seul ?

Publié sur Le Plus du Nouvel Obs le 18 septembre 2011

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27 août 2011 6 27 /08 /août /2011 17:38

000003La classe politique est impitoyable. Ceux qui tutoient les sommets pour exercer le pouvoir sont épiés dans leurs moindres gestes, leur moindre silence, pour être pris à la gorge, puisque notre pays a choisi le combat frontal et stérile du bipartisme. Ceux qui prennent du recul, le temps de la réflexion, à l’inverse, traversent le désert et n’existent plus aux yeux de ce monde-là.

 Mais dès qu’ils reviennent, et que leur voix se fait entendre, voire se fait reprendre, en bref, dès q u’ils recommencent à compter, on leur saute à la gorge avec une frénésie qui dissimule mal la peur du danger…

François Bayrou a l’habitude de ces figures imposées. Et pour cause. Son entrée en politique ne date pas d’hier : il est devenu conseiller général à l’âge de 30 ans… il y a presque 30 ans justement… Aussi, des coups il en a pris. Des adversaires il en a connu. Et des polémiques il en a surmonté.

Mais depuis qu’il a décidé de son indépendance, il est un leitmotiv qui s’invite au débat politique qu’il entend porter. Comme une sorte de toc que ses adversaires prennent un malin plaisir à voir se manifester. Dès que François Bayrou occupe l’espace médiatique, dès que son discours séduit l’oreille, dès que son verbe chatoie une langue devenue universellement de bois, il voit ressurgir la réécriture de son passé, la sur-interprétation de ses positions, la mise en légende de son personnage. Et comme il fait peur, on efface l’impression du héros en quête de vérité pour le grimer grossièrement en ogre opportuniste. La fable est alors sommée d’endormir tout le monde.

 

000002En 2007, pointé à 24% dans les sondages, à quelques dixièmes de Ségolène Royal, il avait subi un acharnement méthodique rappelant qu’il avait toujours été à droite

En 2008, Nicolas Domenach rappelait comment le Président était irrité par le Béarnais, et quelle énergie il déployait pour écraser ce moucheron qui lui empoisonnait la vie

En 2009, alors qu’il perce à 14% d'intentions de vote lors des européennes, et que son livre Abus de pouvoirdevient un vrai phénomène de librairie, et une référence qui ne laisse planer plus aucun soupçon sur son rôle d’opposant à Nicolas Sarkozy, on l’attaque au bas de la ceinture sur ses croyances

Aujourd’hui, en plein mois d’août, il sort un livre à valeur présidentielle. Pas un programme. Mais un engagement sous la forme d’un projet d’idées, qui tente de dire la vérité et d’apporter quelques directions qu’il estime capitales à la survie de notre pays. Il revient dans le jeu médiatique. Et l’on s’acharne, déjà, à réécrire sa biographie, avec raccourcis et mauvaise foi, pour tuer dans l’œuf tout emballement éventuel à l’heure où chacun peaufine encore sa peau dorée par le soleil.

Alors il faut faire preuve de pédagogie. Expliquer. Rappeler les faits. Évoquer la parole des hommes. Ces mots sans lesquels les actes sont manipulables à souhait.

 

François Bayrou est-il un homme de droite ? Son parcours en lui-même ne permet nullement de procéder à un tel raccourci. Participer à un gouvernement de droite ferait donc de vous un homme de droite ? Alors Françoise Giroud était de droite. Elle qui fut ministre sous la présidence de Giscard d’Estaing, elle qui appela à voter… François Mitterrand en 1974. De la même manière, Martin Hirsch, qui fut président d’Emmaüs France, est forcément un homme de droite, lui qui participa activement à l’ouverture orchestrée par Nicolas Sarkozy.

Et puis après tout, jouons de l’absurde : François Mitterrand lui-même n’a-t-il pas participé au gouvernement des secrétaires généraux voulu par le Général de Gaulle avant l’installation du gouvernement provisoire à Paris dès 1944 ? Il est assurément un homme de droite lui aussi…

 

000001Soyons sérieux. François Bayrou n’a toujours revendiqué qu’une seule étiquette : celle du centrisme.Qu’elle ait été baptisée CDS, FD, UDF ou bien encore MoDem.

Inutile de se mentir. Pendant plusieurs décennies, le centre claudiquait en ne marchant que d’une seule patte : celle de droite. Et certains en sont apparemment nostalgiques

Pour autant, il faudrait tout de même rafraîchir la mémoire de ceux qui l’ont un peu trop sélective. Dès 2002, François Bayrou marque sa rupture avec l’ère Chirac. La raison de son ire : la création d’un parti unique, l’UMP, qui visait à absorber en son sein toute les sensibilités, pour les broyer, les centrifuger, en un smoothiecensé tout emporter sur son passage.

Dès 2004, les députés UDF quittent le groupe parlementaire de droite, le PPE, à Bruxelles. Alors que son opposition au gouvernement de Dominique de Villepin se fait de plus en plus pressant, François Bayrou concrétise l’indépendance de l’UDF, lors du congrès extraordinaire de Lyon, qui fit alors de l’UDF un "parti libre", quand Gilles de Robien en appelait à revenir à une alliance à droite. Et, cerise sur le gâteau, le 16 mai 2006, François Bayrou vote la motion de censure déposée par le groupe PS à l’Assemblée nationale à l’encontre du gouvernement de Villepin. Une première pour un député centriste.

 

Pourtant, de ces années de rupture, qui montrent et démontrent le changement de cap opéré par François Bayrou, ses opposants ne veulent rien en dire ou presque. Pire, ceux qui lui concèdent le mettent sur le compte de l’opportunisme. Mais qu’avait-il à gagner personnellement de cet isolement qui lui valut d’être abandonné par ses cadres ? On ne cesse de l’entendre comme si cela montrait son erreur, quand cela montre surtout le cynisme ambiant. Point de maroquin possible dans cette stratégie.

Alors, ceux qui glosent à n’en plus finir sur l’opportunisme en sont pour leurs frais : leur argument n’aura de force que s’il est répété à l’envi, en priant Coué par tous les Saints.   

 

001Leur reste alors de savonner la planche que le Béarnais s’est employé à découper contre vents et marées. Rappeler que la réforme de la loi Falloux lui valut un million de manifestants dans la rue. Certes. Mais occulter de dire que la réforme voulue par François Bayrou ne concernait que les bâtisses vétustes, et que depuis il a assumé ce qu’il considère être un quiproquo, en prenant sa part de responsabilité. Une rareté pourtant, ce mea culpa, chez les politiques.

 

Ses détracteurs répètent aussi qu’il "fait en effet partie de ceux qui ont toujours soutenu la construction de l'U.E. libérale"sous le prétexte qu’il a voté pour Maastricht et le traité de Lisbonne.Mais dans ce cas, combien d’hommes politiques français ont œuvré à cette construction "libérale" ? Étonnant comme les temps ont changé : jadis, on se cachait de ne pas avoir voté contre l’Europe en 1992. Aujourd’hui, on fait la chasse aux sorcières pour débusquer ceux qui ont toujours gardé le cap sur la question…

 

Les détracteurs de l’Europe ont beau jeu de crier au loup : il est toujours plus facile de pratiquer la politique de la terre brûlée en prenant l’Europe comme bouc-émissaire, plutôt que travailler pour corriger les défauts de celle qui, jusqu’à preuve du contraire, nous protège plus qu’elle nous asphyxie.

 

Bay5Dire que François Bayrou n’est pas légitime quand il parle de la dette, parce qu’il a participé au gouvernement Balladur en rappelant que pendant cette période (1993-1995) "le déficit a toujours été supérieur à 3% et la dette est passée de 46 à 55,5% du P.I.B". Et oubliant bien évidemment que le Béarnais n’y a pas été en qualité de ministre des Finances et/ou de l’Économie mais en qualité de ministre de l’Éducation, à une époque où la France traversait déjà, on l’a oublié, une des plus grandes crises économiques qu’elle ait eu à gérer en trente ans. Et puis c’est bien connu : on n’a rien à apprendre du passé, y compris éventuellement de ses erreurs, puisqu’on vous ressert des pages jaunies par le temps pour discréditer vos idées pour le futur.

Enfin et surtout, dénoncer l'alliance du MoDem avec le PS à Lille lors des municipales de 2008, quand le maire d’Arras fait la démarche inverse pour les sénatoriales à venir. Éreintante rengaine qui est ressortie à toutes les sauces et qui a tout du syllogisme. Tu fais alliance à gauche à Lille, tu fais alliance à droite ailleurs, alors tu es une girouette.

 

 Dans ce monde manichéen du bipartisme, qui s’arroge toute la puissance du pouvoir du jeu des chaises musicales, dans cette fête éternelle où l’on est sûr d’être servi, puisque l’on déçoit à tous les coups, et que si l’on repart bredouille au local, on récupère le glaive au national, les Français sont aveugles. Et les borgnes sont les rois.

 Mais notre système politique serait-il devenu à ce point stérile, vain et inutile qu’il est inenvisageable de considérer que l’on puisse avoir de bonnes idées, un bon programme même s’il l’on n’est pas du même bord politique ?


Bay6C’est étonnant comment ceux qui se revendiquent des valeurs républicaines, et qui savent parfois (pas toujours) s’associer pour lutter contre le FN, utilisent finalement des arguments de la même veine, pour accabler ceux qui refusent de voir perdurer la politique politicienne des batailles partisanes. Il faut choisir son camp. Coûte que coûte. Et l’on va reprocher au côté de la force obscure de mettre les Français les uns contre les autres ? Êtes-vous légitimes à faire la morale quand dans votre propre camp, celui des républicains, vous êtes incapables de reconnaître les qualités et le vrai, même quand il vous brûle la cornée ?

La plume de François Bayrou en appelle à la poésie d’Aragon pour raisonner ceux qui s’abreuvent dans l’encre noire du manichéisme, Styx du bipartisme : "Quand les blés sont sous la grêle, fou qui fait le délicat, fou qui songe à ses querelles au cœur du commun combat". Et de rappeler aux imprudents : "Cette bipolarisation, cette guerre des deux, porte en elle le crétinisme de la démagogie."

Quant aux impudents qui font des caricatures, et qui à propos d’autres en déduisent le dérisoire, ils montrent à coup sûr qu’une telle fougue dans le blâme cache mal la peur qui les ronge. Décidément, François Bayrou est un homme qui fait peur… Comme l’épée de Damoclès qui menace les certitudes des bien-pensants.

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18 août 2011 4 18 /08 /août /2011 15:53

  En intégralité l’article paru le 17 août dans une version customisée sur Le Plus Nouvel Obs pour respecter la charte éditoriale. Découvrez ici sa version non coupée avec davantage d'extraits tirés du nouveau livre de François Bayrou, sorti ce jour 2012, Etat d’urgence.

 

Bay5On le disait discret. Absent. Dans le désert. Bien évidemment, l’actualité l’invitait à revenir de temps en temps sur les plateaux ou dans les colonnes de journaux. Mais François Bayrou, pour dire la vérité, a pris le temps de la réflexion. Son dernier livre, Abus de pouvoir remontait à Mai 2009. Dénonçant la politique menée par Nicolas Sarkozy, et plus généralement égrainant les raisons pour lesquelles les valeurs défendues par le locataire de l’Elysée n’étaient pas celles du Président du MoDem, ce livre qui fut un véritable succès de librairie, connut aussi la rançon de sa gloire. Sorti en pleine campagne européenne, il alimenta la critique des adversaires politiques qui accusèrent François Bayrou, qui n’était pourtant pas candidat, à faire campagne contre Sarkozy quand il se devait de la faire pour l’Europe. Daniel Cohn Bendit en tête, lui qui, avec d’autres, firent fi d’un programme et des idées déclinés chaque soir par ceux qui postulaient effectivement à siéger à Strasbourg et Bruxelles. Le jeu politique est parfois cruel, surtout quand il grossit le dérisoire et occulte l’essentiel. Ce fut, ce soir du 9 juin, le véritable début de la traversée du désert qu’on lui prédisait tant depuis 2007.

 

Pourtant, alors que la rentrée politique se prépare en coulisse, François Bayrou a décidé de revenir dans l’arène. Tout l’été. Sans discontinuer.

Rappelant qu’il fut le premier à s’inquiéter de la candidature de Christine Lagarde au FMI, quand l’UMP tout entier et une bonne partie du PS, de concert, vantaient les mérites de celle qui sera, et c’était prévisible, éclaboussée dans les énièmes rebondissements du tribunal « arbitraire » de l’Affaire Tapie.

Qu’il fut aussi en première ligne quand cette décision fut prise à la hâte, au détriment des principes d’égalité que garantit la Justice française.

Que l’euro était la seule voie possible pour résister à la Crise et que ceux qui crient au loup en voulant en sortir sont inconscients au mieux, menteurs au pire.

 

L’heure est d’importance. Pour le monde secoué par la crise, qui n’épargne personne, même les plus forts, en témoignent les Etats-Unis qui ont vu leur note dégradée et les Chinois, leurs créanciers, qui s’inquiètent de voir compromis leurs investissements. Pour l’Europe moderne, qui traverse sa première crise économique et qui se voit tester sur ses principes fondamentaux de solidarité. Pour la France aussi, puisque 2012 sera marquée par la Présidentielle, élection centrale de la Cinquième République, la seule qui offre la majorité pour gouverner un pays depuis l’inversion du calendrier et surtout la seule qui semble encore concerner tous les citoyens.

 

002C’est avec la conscience de la gravité du moment que François Bayrou, sort alors ce jeudi 18 août, 2012, Etat d’urgence. L’occasion pour lui de revenir un peu sur le passé. Et notamment sur 2007, quand on le dépeignait en Cassandre, lui qui, finalement, y voyait assez clair :

« Dans la campagne 2007, j’ai voulu mettre au centre des débats la dette et les déficits qui l’alimentent. Certains considéraient que c’était pour une élection présidentielle un bien noir message. Pourtant, sept millions de Français l’ont entendu. »


Quatre ans plus tard, Nicolas Sarkozy tente de faire adopter sa règle d’or… François Bayrou n’est donc plus seul sur la question de la dette, rejoint sur les chemins de la vérité par ceux qui se sont trompés. D’ailleurs, il n’a jamais été seul comme il tient à le préciser :

 

« On m’a dit seul. C’était faux. Mes amis, les vrais, mes compagnons d’âme et de combat, les vrais, ne m’ont jamais manqué. Mais être taxé de solitude, c’est plutôt bon signe. »

 

Il y aura toujours ceux qui rappelleront au Béarnais que bon nombre d’amis, et d’élus, l’ont délaissé au cours de ses années. Et François Bayrou ne s’en cache pas, même pour y décrire sa peine :

 

« Nombre des parlementaires qui m’accompagnaient en 2007, offusqués que je ne suive pas le nouveau pouvoir, se sont, au moins pour un temps, séparés de moi. Ce ne fut ni agréable ni réjouissant. Mais si tu n’es pas capable de tout risquer quand l’essentiel est en jeu, à quoi bon la politique ? »

 

Bay6Et s’il reconnait volontiers que s’il fut «  une seule chose difficile, c’était de ne pouvoir me faire comprendre de ceux qui avaient partagé mes combats », il ajoute, sur de son fait : « Mais à mes compagnons qui ne me suivaient pas, qui ne me comprenaient pas, je n’en ai pas voulu (…) J’ai toujours cru qu’une fois le chemin fait et les écailles tombées des yeux, nous nous retrouverions, bien contents. »

 

Mais alors, qu’est-ce qui peut bien rendre si confiant François Bayrou ? Serait-il simplement guidé par une conviction intime, comme aiment à le railler ses détracteurs ? Aurait-il changé de cap ? Ou tout simplement détiendrait-il la clef que semble chercher en vain, candidats, postulants, ou participants à la primaire ?


Rien de tout cela. A ceux qui croient encore aux promesses, aux solutions prêtes à penser, aux programmes qui ouvrent les yeux des citoyens, François Bayrou offre une leçon de réalisme et de vérité :

« Il y a deux conception de la démocratie : la démocratie de séduction (…) et la démocratie de conscience. »

 

Pour François Bayrou, la première se complait en des temps de prospérité quand la seconde s’impose d’elle-même dans l’état d’urgence. La crise actuelle n’offre donc pas d’autre choix.

 

On pourra toujours lui reprocher un manque de magie, un manque de rêve. Mais est-ce donc cela la politique, vendre du rêve ? Ou serait-ce davantage guider le peuple vers davantage de raison, surtout en ces temps où la Crise ne donnera aucune chance aux bonimenteurs et aux faiseurs de miracles ? « Nous avons choisi une ligne de conduite : nous dirons la vérité. ». Et le président du MoDem d’en invoquer Orwell : « En ces temps d’imposture universelle, dire la vérité est un acte révolutionnaire »

 

Pour autant, la bonne appréciation d’une situation ne fait pas un programme et apporte encore moins des solutions. On a souvent reproché à Bayrou d’exceller dans la dénonciation, usant et abusant de l’élégance de sa prose pour condamner avec finesse et fermeté, plume de fer dans un encrier de velours, ce qui se détachait de la raison et du bon sens, et Abus de Pouvoir pût-il en témoigner dans sa charge contre les  errances sarkozyennes. 2012, Etat d’urgence rectifie le tir. Avec précision. Et au-delà du diagnostique, offre des solutions. Plus qu’un programme, un engagement.  

 

école2 - TERA ses yeux, la gravité de la situation impose des choix draconiens en termes de priorité. Et à ceux qui multiplient les idées et les propositions en les déclinant de mille faux, à ceux qui choisissent de privilégier le dérisoire pour mieux faire oublier ses manquements, ou encore à ceux qui choisissent la stratégie éternelle du bouc émissaire, François Bayrou n’évoque que deux thèmes. Deux domaines pour remédier immédiatement à l’état d’urgence que la France traverse. A court terme, la production, à moyen terme l’éducation.

« Je suis arrivé à la conclusion que nous avons devant nous deux questions d’urgence nationale, et deux seulement. La première : produire en France. Retrouver la production dont nous avons perdu des pans entiers, pour reconquérir l’emploi et pour équilibrer nos comptes. Et le seconde : rendre à la France la meilleure éducation du monde. (…) Toute les difficultés qui nous paraissent insurmontables proviennent de ce double échec. »


Les autres questions prendront leur place, naturellement dans le débat public, mais François Bayrou tient à préciser :

« Je connais leur importance et ne les perdrai pas de vue, même si je les sais dépendants des deux questions de notre survie, la production et l’éducation ».

 

La production répond à des enjeux imminents : celui de nos finances publiques, de la balance commerciale et plus largement de la dette. Dans sa mire, l’Allemagne. Notre voisin outre rhin, était au plus bas dans les années 2000, quand la France prospérait encore des fruits d’une croissance retrouvée. L’état d’urgence fut alors décrété sous la forme de l’agenda 2010, initié par Schröder, avant que Angela Merkel ne confirme son orientation. En 2011, ironie du sort, François Bayrou rappelle que la France n’en finit plus de voir le chômage grimper quand « Ceux qui licencient en Allemagne aujourd’hui ce sont les agences pour l’emploi » !


Les propositions avancées par Bayrou s’inspirent donc de la recette allemande, dont l’industrie n’a jamais cessé de se diversifier et d’offrir un label de qualité à l’image des messages publicitaires qui vantent le sérieux à l’allemande et qui s’est fondée en grande partie sur l’assainissement des finances publiques.

Le lecteur pourra à sa guise en découvrir le  cheminement en lisant le livre, mais à ceux qui seraient avides de propositions, en ces temps de y’a qu’à et il faut, en voici un petit concentré qui délectera les palais les plus délicats : encourager la production en France en simplifiant l’administratif et en détruisant le barrage fiscal des moyennes entreprises créatrices d’emplois, créer un label comme il en existe pour le commerce équitable ou encore l’agriculture Bio pour sensibiliser le consommateur et responsabiliser des achats qui garantiront ses emplois, deux points de TVA supplémentaires, plus de flexibilité dans l’embauche, l’ajout de deux tranches imposables pour les revenus les plus élevés…


PSA ceux qui l’accuseraient de parler d’entreprise, François Bayrou les accuse de manichéisme :

« Il n’y a pas de reconquête possible du produire en France sans reconquête de la confiance entre salariés et entreprises. Chefs d’entreprise, encadrement, organisations patronales, syndicats, dans ce grand pays où l’on parle tant, paraissent incapables de s’asseoir autour d’une table, de débattre et de négocier, dès qu’il s’agit de décisions collectives. Tout y est vécu sur le mode du soupçon, de l’affrontement, du conflit. La compréhension mutuelle paraît interdite. C’est une immense faiblesse. Cela empêche des audaces sociales qui sont pourtant la clef des grandes réussites. »

 

Une position d’autant plus équilibrée que François Bayrou n’omet surtout pas de préciser :

« Je ne crois guère, chiffre à l’appui, à la diminution drastique du nombre de fonctionnaires. »

 

Mais il ne peut y avoir de sursaut sans une population correctement formée. L’Education est alors auscultée dans ses moindres détails… Là aussi, le diagnostique est inquiétant. Mais combien de livrent glosent sur cette déchéance. François Bayrou va plus loin en proposant des solutions. Qui risquent de ne pas passer inaperçu, surtout qu’il n’avance pas masqué : « On m’accusera d’être « réac ». Tant mieux. »


Rappelant que c’est « un choix de priorité que de protéger l’éducation en maintenant, sur une longue période, les moyens qui lui étaient alloués », il lance aux fossoyeurs de l’éducation nationale, qui préfèrent mettre en valeur ses faiblesses plutôt que de résorber ses faiblesses : «  dois-je rappeler, à ceux qui trouvent que l’enseignement est trop cher, quel serait le coût de l’ignorance ? »

 

école1Puis il propose quelques pistes, qui dénotent déjà avec les orientations prises tant à droite qu’à gauche : la fin de l’idéologie des perpétuels petits groupes quand la vocation de l’école est d’amener à l’autonomie des élèves, des programmes stabilisés pour la cohérence et votés par le Parlement pour en soustraire l’amphigouri jargonneux, un collège qui ne contente pas d’être unique, « inique », mais qui des recours effectifs aux décrocheurs non pour les exclure définitivement mais pour ne pas grossir encore davantage le rangs de ceux qui quittent l’école sans savoir lire, écrire et compter, la réévaluation des objectifs et non le nivellement par le bas auquel on procède pour cacher la misère de nos résultats, une Terminale en forme de propédeutique à l’Université, la détection des enseignants qui réussissent pour transmettre leurs expériences tout en garantissant la liberté pédagogique de chaque professeur qui pourra adapter sa propre méthode sans se voir imposer une idéologie par un ministre…


Reste la question qui se pose pour gouverner : avec quelle majorité Bayrou pourrait-il travailler s’il venait à être élu ? Le Président du MoDem n’élude pas cette interrogation légitime.


D’une part, il rappelle qu’en cet état d’urgence, le clivage droite/gauche est une alternative obsolète, faite pour animer les débats politiques en temps de prospérité. Dénonçant les promesses intenables déjà faites par la droite et la gauche, entre la réduction d’impôt et l’improbable appel à la croissance sans solutions des uns, et la dépense toujours accrue avec pour seule recette la Providence pour les autres, François Bayrou n’y va pas par quatre chemins : « Cette bipolarisation, cette guerre des deux, porte en elle le crétinisme de la démagogie. ».


Il précise :

« Les deux camps (…) sont avec le temps devenus prisonniers de groupes de pression qui ne leur laissent pas le choix. ». avant de prédire : « Si la guerre des deux perdure, c’est la certitude de l’échec et, partant, la certitude du clash. ».

 

Pour voir chacun des deux troupes s’affronter dans l’hémicycle, avant de déclamer de manière moins mécanique dans les couloirs quand les masques de la comédie sont tombés, François Bayrou sait qu’individuellement, une bonne majorité de chacun des deux clans rejoignent sa vision et les idées qu’il propose.

 

004Et ce qui était séduisant en 2007, devient impératif pour 2012 : l’opposition pavolovienne clan à clan provoquera la perte de la France, qui ne s’en sortira qu’avec une union nationale :

« Quand on sait que des efforts devront être consentis, chacun des citoyens doit avoir la certitude que les décisions prises ne seront ni partiales ni partisanes, qu’elles ne serviront ni intérêts de groupe, de classe ou d’idéologie. Le pluralisme de la majorité garantira que les décisions seront nécessairement d’intérêt général ».

Bayrou en réfère même à Aragon pour illustrer la nécessité d’une telle union : « Quand les blés sont sous la grêle, fou qui fait le délicat, fou qui songe à ses querelles au cœur du commun combat ». Rappelant que le redressement de l’Allemagne ne put se faire qu’en faisant travailler, main dans la main, les ennemis jurés de la CDU et du SPD… « Les politiques abandonnent leur confort et leurs habitudes, leurs préventions et leur égotisme, acceptent de partager l’effort et même la possible impopularité. ».


Mais pour ce faire, il faudra bien évidemment que certains acceptent de délaisser la politique des clans, sans pour autant se renier. Un enjeu ambitieux. Mais pour François Bayrou, c’est à ce prix, et seulement à ce prix, que l’état d’urgence, qui « est précisément le temps pendant lequel on peut encore faire quelque chose » laissera sa place à des temps plus apaisés.

 

Bay01

 

On pourra toujours reprocher à François Bayrou de ne pas avoir chiffré ses propositions, et même de ne pas avoir tranché notamment concernant le financement de la CSG par la TVA comme le préconise depuis des années Jean Arthuis, mais 2012, Etat d'urgence n'est pas un programme. Pas même un acte de candidature. Juste un engagement qui laisse entrevoir un projet. La voie qu'il espère voir la France emprunter. De là à se voir en guide, il y a un pas que François Bayrou ne franchit pas encore...

 

Et n'oubliez pas l'article consacré à la partie Education du livre, commenté et analysé ICI

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15 août 2011 1 15 /08 /août /2011 09:40

Huit mois après avoir fait du gringue à Cuisine TV Morin2pour ses vœux, Hervé Morin distribue des préservatifs sur les plages de France pour défendre l’idée : "L’Euro te protège." Fallait y penser.

Le président du Nouveau Centre enfile les sorties médiatiques comme des perles afin de redorer son blason, lui qui bénéficie d’ une notoriété assez terne pour un ancien Ministre qui aura tenu plus de trois ans son portefeuille. Pour quelqu’un qui se dit éventuellement prêt à relever le défi de la présidentielle, l’élection d’un homme par excellence, la tâche parait même ardue puisque, à l’exception d’une pointe à 33% d’opinion favorable en 2009 et 2010, Hervé Morin stagne aux alentours de 25 %. Pire le nombre de personnes qui ne se prononcent pas l’emporte largement, autour de 60% en 2007 et encore à 38% aujourd’hui. Une conclusion s’impose : Hervé Morin laisse les Français indifférents.


Pourtant, il serait bon de se pencher quelque peu sur la personnalité d’Hervé Morin. Surtout s'il venait à se mêler aux débats de la prochaine présidentielle, faute d'avoir pu négocier davantage. Inutile pour cela de remonter très loin dans la biographie du bonhomme. Le dernier lustre suffit à nous éclairer.

 

Morin3Fidèle disciple de François Bayrou lors de la Présidentielle de 2007, le député-maire d'Epaignes n’avait pas d'homélies assez rudes pour condamner la conduite de Nicolas Sarkozy, en rappelant notamment que les atteintes aux personnes avaient augmenté de manière substantielle depuis 2002, alors que l'ancien Maire de Neuilly officiait Place Beauvau, qualifiant le futur "Ministère de l'Immigration et de l'Identité nationale" de "gadget électoral", soulignant que le favori "était incapable de se rendre en banlieue alors qu’il avait prêché au Ministère de l’Intérieur pendant cinq ans." Sans oublier de marteler : "Le seul vote utile pour ceux qui n’ont pas envie de Nicolas Sarkozy, c’est Bayrou". La messe était dite.


Certains s'amusaient à dire qu'il était de loin le plus bigot et le plus fougueux pour accabler Nicolas Sarkozy de tous les maux. Il en sera légitimement récompensé pour justifier l'ouverture du nouveau locataire de l'Elysée avec un maroquin de trois longues années à la Défense. Le baptême fut vite expédié aux côtés des autres convertis de Kouchner à Besson. Miracle. Hervé Morin, comme par enchantement, avait retrouvé sa boussole. Lui qui affola les girouettes en ne reconnaissant plus, durant les quelques mois de campagne, la gauche de sa droite, à le croire.

   

 

 

 

Morin5La légende du Tartuffe venait de naître. Restait à bâtir sa paroisse. Il accusa François Bayrou d'apostasie, et bâtit son temple dès la rentrée 2007. Il reprit à son compte les textes sacrés et charma l'ensemble des disciples de celui qu'il avait quitté. Peu importe que les assemblées, composées seulement d'élus et de si peu d'adhérents, pussent se tenir dans une cabine téléphonique.

 

Tartuffe fut adoubé Seigneur des lieux. Mais afin de ne pas être taxé de secte, le Nouveau Centre dut participer aux législatives. Et comment procéder, quand on est pleinement inféodé au parti de la majorité présidentielle ? Facile. Il suffit tout simplement de jurer fidélité au saint des Saints et de négocier quelques circonscriptions afin de pouvoir bénéficier du financement public en réunissant 1% des voix dans un minimum de 50 circonscriptions. Restait à trouver des ouailles pour les ordonner dans ces fameuses chapelles qui attendaient preneur.

 

 

 

 

Esquisser un bout de paradis, et voyez comme l'église se remplit. Tartuffe s'en tira à bon compte. Pendant trois années, bon an, mal an, Tartuffe prospéra sans faire de bruit. Il faut dire qu'il ne rédigeait pas la messe. Il la lisait seulement. Psalmodie à la gloire de l'Unique. Avec ce qu'il faut d'ombre et de discrétion sur une dé-classification partielle des documents relatifs à l'affaire Karatchi et ses juteuses contributions au financement probable de la Présidentielle de 1995. Secret d'alcôve.


Mais, fin 2010, Sarkozy mit fin à son Vatican II. Fi de l'ouverture. Retour au dogme pur et dur. Exit les petites paroisses témoin. Place aux cathédrales en pierres dures. Notre Tartuffe, bien mal loti, revêtit alors son costume de lumière, qu'il affectionne tant. Changement de veste. Il tire à boulets rouges et blasphème à tout va :

 

 

 

Retour à la case départ. L'excommunié repart en croisade. Il croise évidemment quelques amis. Mais ces félons veulent toujours être Judas quand lui se réserve la place du Christ. Alors il souhaite rompre le pain seul...

Ainsi vous fut brossé le portrait de Tartuffe, le faux centriste. Faux centriste car, pour lui, il n'y a point de tergiversation :le chemin de la vérité est à droite selon Hervé Morin. L'ère des schismes n'est qu'illusoire. A quelques mois de l'élection présidentielle, le chemin de croix est connu. Partout, on annonce la guerre des Centres. Avec l'envie pour tous d'être le seul à tenir le bâton du pèlerin...

C'est vrai que Tartuffe et Saint Borloo ont tous deux rompu avec Saint Nicolas. Mais le premier a montré sa divine capacité à prêcher pour toutes les paroisses, quitte à faire participer la famille et les chauffeurs, le second peine à faire croire que son pèlerinage aura bien lieu.

 

Le premier martèle que le centre est à droite, fidèle à son girouette interne, Borloo a depuis longtemps fait ce choix, lui qui faillit devenir Premier ministre il y a peu... Pourtant, le centre c'est bien la voie du milieu, non ?

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18 mars 2011 5 18 /03 /mars /2011 20:46

blog fredSaviez-vous que les cantonales 2011 seront historiques ? Étonnamment, les médias n’en disent rien. Pourtant ce sera la dernière élection organisée pour la Constitution du Conseil Général. En effet, se profile en 2014, une réforme territoriale qui va voir se fusionner département et région pour lutter officiellement contre le mille-feuille administratif somme toute couteux. Bien moins coûteux que le manque à gagner de la suppression prochaine de l’ISF mais qu’importe, c’est le symbole qui compte. Et sous cette réforme se terre la consécration cynique et froide d’une logique qui rayonne aux Etats-Unis et que d’aucuns souhaitent voir triompher sur nos terres : le bipartisme.
Car il nous faut être précis et honnête : que nous réserve cette réforme territoriale sous la forme de son projet initial ? Une élection uninominale à un tour à scrutin majoritaire. En d’autres termes, seront automatiquement exclus les partis, les mouvements et tous ceux, minoritaires, qui avaient la possibilité d’apporter de la nuance dans le paysage politique français. L’aumône d’une proportionnelle à hauteur d’une quinzaine de pourcent n’y changera rien : à l’exception des deux partis dominants depuis un demi-siècle, les autres voix se tairont, devenant plus marginales que la loi de financement des partis ne les rend déjà.

L’alternance va donc laisser place à une alternative unique. Droite/gauche. Cette même alternative qui écœure un par un les Français, cette même alternative qui a montré ses limites et ses carences, cette même alternative qui gonfle les scores du Front National qui entonne « l’UMPS » comme rempart à ce bipolarisme.

Mais cette vision manichéenne de la politique française ne saurait se résoudre en une réponse unique de rejet consistant à mettre les Français les uns contre les autres. Prenons l’exemple de Bruxelles et du Parlement Européen, où l’objectif n’est pas comme au Palais Bourbon, de faire passer sa loi ou de faire chuter le projet de tel groupe, mais de trouver un consensus et de s’entendre sur ce qu’il faut ou ne faut pas faire pour les Européens. Les combats politiques doivent être au service des citoyens et non des étiquettes. Il n’y a pas d’idées de droite ou d’idées de gauche : il y a de bonnes ou de mauvaises idées, des projets innovants ou réactionnaires, des visions efficaces ou parfaitement inutiles.

Frédéric Lambin est le symbole de cette vision nuancée et progressiste de la politique, la seule qui puisse réconcilier les citoyens à la politique : en participant à une majorité plurielle au sein du Conseil municipal de Lille, il travaille chaque jour, dossiers après dossiers, à faire fi des étiquettes et à construire pour le bien être des Lillois. De la même manière, son action dans l’Ecole de la deuxième chance n’a que faire de la carte du parti qui se cache dans le portefeuille de ses partenaires : seule la volonté de redonner de la dignité à ces jeunes sortis du système scolaire afin de les aider à trouver du travail et à se construire un demain guide son quotidien.

Quand Frédéric Lambin propose d’être au centre de vos attentes, ce n’est donc pas qu’un simple slogan. C’est la promesse faite aux habitants de Mons en Baroeul, de Fives, de St Maurice Pellevoisin et plus généralement de l’ensemble du département du Nord de travailler pour eux afin que la voix de chacun soit entendue et prise en compte. L’alternative bipolaire n’a jamais fait cette promesse. Et pour cause, elle n’aurait jamais pu la tenir. Assurément, voter Frédéric Lambin, c’est faire le choix de la pluralité. La promesse de ne pas être manichéen.

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17 novembre 2010 3 17 /11 /novembre /2010 09:49

CentreQue faut-il retenir de ce remaniement ? Les langues se délient depuis quelques jours pour tenter de trouver une signification aux menus ajustements opérés afin surtout de préparer au mieux les Présidentielles de 2012 et d’éviter à notre Monarque la déconvenue que connut Valérie Giscard d’Estaing en son temps. Que Roselyne Bachelot a un intitulé de Ministère aussi sibyllin et dérisoire que ne le fut son action à la Santé et au Sport ? Sans doute pas. Que le Ministère de l’Education Nationale reste le temple du brushing laqué ? Certainement pas. Que Frédéric Lefebvre voit son zèle outrageux et d’une caricature cynique payé d’un pauvre secrétaire d’Etat qui aura moins le mérite de rendre moins audible son futile verbiage ? A la limite…

Non, ce qu’il faudra surtout retenir de ce remaniement restera assurément le traitement réservé aux Centristes… D'ailleurs la presse ne s'en cache pas : les manchettes se sont multipliées à l'envi sur la question. Le Président a pareillement organisé hier soir sa petite sotterie tradictionnelle avec 20 millions d'invités et a dû lui aussi s'épancher sur le sujet. Sans parler de l'exégèse confuse et brouillonne que fut l'émission d'Arlette Chabot, qui semble confondre le métier d'animatrice et celui d'éducateur en centre aéré... Le crochet de France2 n'en fit pas plus l'économie, à l'aide d'un Marc-Philippe Daubresse davantage potache que pontife.

Seulement à force de parler de centrisme l'on en oublie le sens qui se cache derrière cette sensibilité. La confusion règne même comme ici à la une de 20 minutes, où l'on voit De Villepin sièger aux côtés d'authentiques héritiers du Centre... ou presque. Soi-disant centristes… ou aux inopportunément dénommés centristes… Un Centre dont la gauche serait à droite, ou la droite serait à gauche. Un certain vertige nous saisit, et tel l'enfant qui découvre un mot l'emploie n'importe quand, l'impropriété est de mise depuis dimanche.

20minutes

Le centrisme peut-il être incarné par Dominique De Villepin, sous le seul prétexte qu'il est un opposant à Nicolas Sarkozy ? Son adhésion à l'UMP n'est-elle pas le signe de son appartenance affirmée au parti présidentiel ? Que dire dans ce cas là de Marc-Philippe Daubresse qui se revendique du centre historique tout en étant vice-président de l'UMP ? A ce niveau là, il appartient davantage au centre hystérique qu'autre chose...

Le centrisme est-il celui de Morin qui ne tend que dans le sens où sont distribués les portefeuilles et autres honneurs de pacotille qui glorifient les portraits que garderont la postérité ?

Ou serait-ce celui des Radicaux, Jean-Louis Borloo à leur tête, qui se sont formés autour de beaux principes et de policés discours mais qui préfèrent les ranger au placard sitôt franchi le pas de l’Elysée ?

François Bayrou en se coupant des proches de l'UDF, qui sera définitivement enterré au Congrès de Paris du 12 décembre prochain, peut-il assumer à lui seul cette sensibilité ?

A moins qu’il ne faille chercher du côté certains Sénateurs, qui sont restés fidèles au Béarnais, mais qui commettent ici ou là des infidélités dès lors que le vote d’une loi pourrait mettre en danger leur siège...

Entre le centrisme de Ministère et le centrisme de caractère, le débat est lancé.

Il faut bien dire que la notion même de « Centre » pose un problème de définition. François Bayrou qui s’en revendique l’héritier légitime rappelait ce week-end que, celui qui est au centre, est celui qui n’est ni à droite, ni à gauche, ou plus exactement qui n’accepte pas la bipolarisation de l’échiquier politique. Problème : la notion même de centre ramène à un clivage droite gauche, puisque le centre implique un équilibre entre deux pôles.

De la même manière, les héritiers du Centre se revendique de Lecanuet. Mais peut-on se revendiquer de VGE ? A ce titre, Jacques Delors n’est-il pas dans l’âme plus centriste dans ses positions et dans la manière qu’il a géré l’Europe que Raymond Barre par exemple ? Et Michel Rocard est-il nécessairement plus éloigné des positions du Centre qu’Hervé Morin, quand l’un a été le premier Ministre de Mitterand et l’autre Ministre de Sarkozy ? Cette dernière question annihile l’argumentation de ceux qui prétendent, à tort, que le centre est nécessairement définie à l’aune d’une politique placée à droite.

bayrouA la vérité, la notion de Centre est par nature protéiforme. Et ce, pour une raison très simple : bien que l'on veuille nous faire avaler, coûte que coûte, que la politique française est manichéenne, hydre à deux têtes, tantôt à droite pour les pouvoirs centralisés, tantôt à gauche pour ceux qui sont décentralisés, l'Histoire de la France nous montre avec insistance que la politique française ne saurait se résumer à un schéma aussi simpliste. La glorieuse époque des Lumières qui a donné ses lettres de noblesse à la quête de la vérité et de la Justice ne peut se contenter d'une vision aussi réduite de la pensée. La preuve en est qu'au sein même des deux grands pôles, et au-delà de toutes polémiques des micro-partis de façade, qui contournent en toutes légalité la loi des financements des partis politiques, de nombreuses nuances s'affirment en permanence, que cela soit en groupe de reflexion, en collectif ou autres associations. Les élections internes du PS n'avaient-elles pas vu s'affronter six projets pour une prétendue sensibilité identique ? Peut-on décemment croire Bertrand Hamon, quand il affirme, brillant d'hypocrisie, que DSK est plus proche du PS que du FMI ? N'y aurait-il pas une once de différence entre Henri Emmanuelli et Manuel Valls ? Et que dire de Laurent Fabius, qui change de veste en fonction des vents dominants, et qui en plus de trente ans de carrière politique a prêché dans plus de chapelles qu'il en existe dans les 36000 communes de France réunies ?

Soyons raisonnables. Si le Centrisme se décline avec autant de couleurs et d'héritiers, c'est tout simplement qu'il est le seul terreau sur lequel peuvent s'établir les vrais débats, et non pas de simples nuances hypocrites qui s'effacent sitôt qu'elles sont minoritaires dès lors que le combat de coq entre les deux grands pointe le bout de son nez.

Il est aussi incontestablement une brèche dans le partage des pouvoirs, car les élections successives ont montré que dans un contexte où les gouvernants ont déçu tour à tour, à force de promesse et d'inertie combinées, il y avait de place pour la singularité de celui qui ose proposer un tout autre discours, fait de nuance, qui n'oppose pas de manière antithétique la Droite et la Gauche, mais qui n'aspire qu'à trouver la voie la plus juste.

Tant que "le Centre" portera sa Croix, c'est-à-dire "ce nom" qui le place irrémédiablement sur cette grille de lecture dans laquelle il ne peut être qu'un parent pauvre, l'éternel "oui-oui" qui béatement colore sa destinée de discours "non-non", il ne pourra jouer un rôle durable et légitime dans les élections majeures.

modemSi aujourd'hui, selon le dernier sondage IPSOS, François Bayrou est celui qui incarne le mieux le Centre pour 41% des sondés, contre seulement 24% pour Jean-Louis Borloo, ce n'est pas un hasard. En coupant les ponts avec un UMP cannibale, qui ne laissait pas la place à la nuance, et, plus grave, qui a été en contradiction totale avec les valeurs républicaines qui fondent la singularité et la qualité de vie à la française, le Président du Mouvement Démocrate se montre comme le seul légitime à l'héritage centrisme. A ceux qui prétendent que le MoDem ne sait pas où il est, lisez ceci : s'il est question de la grille simpliste droite-gauche, alors assurément, le MoDem est partout et nulle part à la fois. Question futile que celle-ci. Si en revanche, il convient de savoir sur quelles valeurs il entend porter sa vision politique, alors la réponse sera toute autre : il s'agit de mettre l'homme et son bien-être dans une communion raisonnable avec l'économie de marché, dans laquelle l'un ne prend pas le pas sur l'autre, dans laquelle chacun trouve sa place, avec le nécessaire épanouissement sans en oublier l'altruisme qui rend chacun responsable du bonheur de l'autre. C'est aussi un état responsable, solidaire sans être dispendieux, en qualité sans se répandre en quantité. C'est enfin l'affirmation pure et dure, sans concessions aucune d'une séparation sans égale des pouvoirs que sont le judiciaire, le législatif et l'exécutif mais aussi le spirituel, le financier et le médiatique. Pour que plus jamais ne soit posée ne serait-ce que l'ombre d'un doute sur une décision ou un fonctionnement.

Alors avant de prendre des vessies pour des lanternes, apprenez à reconnaître le centrisme. Le véritable. L'authentique. Cessez de disserter vainement sur l'électorat potentiel de celui-ci pour se "recentrer" sur les valeurs profondes et singulières qui le fondent, son essence même. La différence entre le centrisme de Ministère et le centrisme de caractère revient à faire la part des choses entre le véritable et sa contrefaçon. La technique ne remplacera jamais une éthique. A condition d'en changer l'appellation. 

 

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20 octobre 2010 3 20 /10 /octobre /2010 15:29

Alors que le concert sur les retraites bat son plein, la Droite restant d’une fermeté sans égale quand la Gauche déploie ses arguments dans la rue, le MoDem n’existe pas. Il reste inaudible. Inquiétant à quelques mois d’une Présidentielle qui s’annonce plus ouverte que jamais. Une absence qui n’émeut malheureusement pas grand monde. Sauf un téléspectateur qui, lundi, s’est posé la question, suscitant l’intérêt des éditorialistes de C dans l’air qui durent répondre à la question qu’il faudrait se poser.

 

 

Le premier constat qui s’impose à nous est sans équivoque et à ce titre, il fait mal, voire très mal : le MoDem est donc complètement inaudible. Ce que l’on réprouvait lors des Régionales s’avère être une constante macabre. Plus personne ne sait ce que pense le Mouvement Démocrate. Plus personne ne sait où se positionne le Mouvement Démocrate. Mais surtout plus personne ne s’intéresse au Mouvement Démocrate. La pilule est dure à avaler mais il est un fait indéniable : quand le MoDem avait un poids électoral, et qu’il brouillait en quelque sorte le rapport de petit journalforce de la bipolarisation de par son autonomie, contrairement aux Verts ou néo-Verts rapatriés d’Europe Ecologie qui n’ont jamais fait de l’indépendance leur mode de fonctionnement, étant inféodés au Parti Socialiste, le dialogue s’instaurait et ses positions étaient reprises, débattues ou contestées. Aujourd’hui, ses points de vue se diluent, perméables aux deux discours dominants, en tous cas en termes de résonnance. Pire, la seule vision que l’on en a consiste en fil directeur sarcastique que le Petit Journal décline à l’envi, pour le plus grand plaisir des spectateurs, qui s’amusent de la dérision avec laquelle le Shadow Cabinet et son Président sont raillés jour après jour. Cette création se voulait singulière et un gage de sérieux ; elle n’est finalement que le prétexte à une guignolade sans fin, ni finesse.

D’autre part, le fait de lier par le destin des retraites le MoDem au FN a de quoi laisser perplexe. Ce n’est pas la première fois, me direz-vous, que le rapprochement s’opère. La première offensive fut sémantique quand de soi-disant analystes prétendirent avec bêtise que Bayrou, en jouant sur la dénonciation du traitement médiatique et la dictature des sondages, faisait du « Le Pen light », expression, que reprit assez servilement un certain Monsieur Bernard de la Villardière qui à coups surs, ne doit sa carte de presse qu’à un jour de pâques quand il découvrit avec béatitude son Kinder Surprise. « De la Villardière, journaliste light » persifflait non sans acuité Thibaut Lannoy, qui travaille aux côtés de deux de nos plus emblématiques élus du Nord, à savoir Olivier Henno et Jacques Richir. La seconde fut mise en scène un certain jeudi noir, dans une émission consternante, et à la ligne éditoriale inconséquente, à trois jours du scrutin  des Européennes, quand dénonçant maladroitement la mécanique et l’instrumentalisation des sondages (encore !), François Bayrou reçut un soutien appuyé et incommodant de Marine Le Pen, top contente de voir les thèses familiales de la victimisation trouver une caution légitime.

lepenPourtant le silence du FN et du MoDem n’ont pas du tout les mêmes raisons. Pour le parti de Saint-Cloud les raisons sont intrinsèques, pour le Mouvement de François Bayrou, elles sont extrinsèques. Le silence supposé du FN ne montre qu’une seule chose : le parti de Jean-Marie Le Pen n’a que faire du sort des retraites actuellement. Englué dans une lutte interne faite de querelles intestines et de népotisme traditionnel, dans un parti qui a toujours eu pour tradition de faire payer (chèrement !) le positionnement sur ses listes, ce qui fait que le haut du pavé est essentiellement tenu par des personnes aux ressources certaines, ce manque d’intérêt n’a rien de surprenant. Le FN le sait bien : ce n’est pas sur ce thème qu’il pourra faire campagne. En revanche, l’analyse de Krivine est bien trop caricaturale :

 

 

Il est loin le temps où le programme social se résumait en une politique nataliste à l’exclusive de la préférence nationale, la libre négociation des salaires ou encore la liberté de licenciement propre à l’économie anglo-saxonne. Son volet social s’est étoffé, et même s’il se circonscrit dans des perspectives discriminatoires pour celui qui n’a pas la chance d’ être français (excluant même ceux qui travaillent et payent leurs impôts sur notre territoire), force est de constater que le rapprochement avec le Medef est d’une simplicité voire d’un simplisme qui en dit long sur le discours populiste et réducteur auxquels s’adonnent les anciens responsables de la LCR et les nouveaux notables du Parti Anticapitaliste. Résumer la ligne politique du FN à celle du Medef, c’est faire le jeu du FN en le plaçant à l’extrême droite, et donc rationnaliser un éventuel rapprochement avec la droite républicaine comme ont tenté de le faire sur le terrain de la préférence nationale Philippe De Villiers ou sur le terrain des mœurs et de la morale Christine Boutin. C’est en somme fortifier son électorat, le parti n’ayant pas besoin d’une telle aubaine pour bien figurer dès que le scrutin n’est plus local. krivineLe PA, comme naguère la LCR n’apprend rien de son passé : qui s’en étonnera de la part de ceux qui se revendiquent du trotskysme en 2010… Devant un tel manichéisme et une telle vision aussi caricaturale du champ politique, il était vain d’attendre de Krivine une analyse sur le positionnement du MoDem, à moins d’entendre la litanie selon laquelle François Bayrou est de droite, et de montrer une fois de plus l’aveuglement bête et méchant dont fait preuve le parti du plus célèbre facteur de France, pour le pas dire l’onanisme. Car à rester seul, c’est bien connu, cela peut rendre sourd…

 

La réponse apportée par Guillaume Roquette, Directeur de Valeurs Actuelles est autrement plus instructive :

 

 

En rappelant clairement le positionnement du François Bayrou, Guillaume Roquette met le doigt sur la problématique : la position du Mouvement Démocrate sur les retraites est nuancée et technique. Quoi de plus normal sur un sujet aussi épineux. Soyons francs, si un problème d’une telle difficulté et qui prenait une telle ampleur dans l’âpreté des débats pouvait se circonscrire à une réponse simple et claire, nul doute que des millions de personnes ne manifesteraient pas actuellement dans la rue et que l’affaire n’aurait pas pris plus de quelques jours. Mais à la manière d’Arlette Chabot qui lança un tonitruant « que c’est technique et compliqué » sur le plateau d’A vous de juger à une Martine Aubry qui tentait d’y voir clair dans les propositions de la Gauche, il faut aller au plus simple. Sans pédagogie. Sans précision. Un brouhaha sonore an quelque sorte.

Arlette-Chabot pics 390Et c’était d’autant plus compliqué pour la Secrétaire du PS que sa réponse, qui, pour la résumer, admettait que pour avoir un taux plein, l’on était contraint d’admettre que 41 annuités et demi étaient nécessaires, accordait donc du crédit à la réforme menée par Eric Woerth en terme d’années de cotisation, ce sur quoi finalement peu de manifestants et de « bloqueurs »  sont en accord. Ce que ne manqua pas de souligner la frange gauche du PS, Hamon en tête, depuis quelques jours. « Affirmer une position sur les 41 ans et demi, c'est nous mettre en décalage avec la mobilisation sociale », explique Pascal Cherki, maire du XIVè arrondissement de Paris, qui précise : «Tactiquement cette position est une faute car elle résonne comme une gifle claquée à la face de millions de salariés mobilisés contre le projet de Nicolas Sarkozy et de François Fillon». Pas de véridique en politique mais de la tactique. En d’autres termes, peu importe la raison, c’est l’opinion de la rue qui l’emporte. Melenchon n’est plus le seul à se revendiquer du populisme.

PSCar il est une donnée indéniable dans cette politique moderne : l’on est manichéen ou l’on n’existe pas. C’est tout pour, ou tout contre. Sans quoi l’on vous taxe de ne pas savoir trancher. Noir ou blanc, point de gris. Et c’est ainsi que l’on prétend résoudre la si précieuse et délicate mécanique de la République. Razzy Hammadi, secrétaire national aux services publics, en fait l’illustration la plus probante quand il explique : «La différence avec la droite ne peut pas être une question de curseurOser dire que l’on a des convergences avec l’autre parti, c’est nécessairement faire le deuil de milliers de voix. Et la quête de la vérité ne vaut pas cette perte du pouvoir pour la gauche. C’est la raison pour laquelle, Martine Aubry avait tenté de crier à la méprise quand elle annonça au journal de 20 heures qu’elle envisageait l’âge du départ à la retraite à 62 ans. Elle répéta à l’envi que ce n’est pas ce qu’elle avait voulu dire. Car à présent, il y a ce que les politiques disent et ce qu’il faut comprendre qu’ils disent avoir dit en écartant ce qu’ils ont dit sans avoir voulu le dire. C’est le genre d’argumentation qu’aurait très bien pu utiliser Jean-Paul Guerlain, quand il avait prétendu que les nègres étaient paresseux, vendredi midi au journal d’une Elise Lucet étonnamment silencieuse après une telle dérive.

BayrouEt François Bayrou alors ? Eh bien sa position est assurément plus complexe. Car il n’y a pas de solution miracle à un domaine aussi technique que le système de répartition des retraites. Et c’est bien là que  le bât blesse : la politique française semble de désintéresser profondément des nuances et de la subtilité qui différencie une bonne idée d’une pensée démagogique et électoraliste. La quête de la vérité ne semble plus être la priorité de nos politiques. Seules comptent les voix, quitte à simplifier ou à mentir : « Je ne souhaite pas et ne nous souhaite pas revivre une quatrième désillusion lors de l’élection présidentielle de 2012 » rappelle d’ailleurs Pascal Cherki sur son blog. Seulement, Monsieur Cherki et autres disciples de la machine à voix, la politique ne se résume pas à gagner des élections. Il ne faudrait pas confondre la finalité et les moyens d’y parvenir. L’objectif de la politique est avant tout d’être au service de la vérité et du citoyen. Cela nécessite une importante part de risques, notamment quand le bien de tous s’oppose à l’opinion générale. L’abolition de la peine de mort était elle populaire en 1981 quand Badinter la fit voter ? Assurément pas. Pourtant qui oserait le remettre en question trente ans plus tard avec l’espoir raisonnable d’être suivi en masse ? Pour faire de la politique, il ne faut pas être dogmatique au risque de se scléroser. Le PS en sait quelque chose. Mais les velléités comme celle de Delanoé qui osa un « je suis libéral » en 2008 sont assez rares et éphémères. Le payant très cher lors des élections internes pour le poste de secrétaire général, il fit machine arrière… à grandes enjambées.

bayrou-different1Faut-il enfin rappeler qu’en politique, la nuance ne doit pas être perçue comme l’affirmation d’un non-positionnement mais comme celle d’un non-alignement ? Il faut rompre ces tics et ces tocs qui consistent à épouser une cause et des valeurs qui ne sont pas siennes pour espérer en être payé de retour. Mieux vaut perdre avec ses valeurs que de triompher dans le déshonneur. Le MoDem, en nuançant sa position sur les retraites, fait l’audacieux pari de l’honnêteté (il ne ment pas en prétendant que la réforme est vaine et inutile) et de la fraternité (il refuse que l’âge de 67 ans pour une retraite à taux plein soit uniformisé notamment pour ceux dont la pénibilité du travail et le morcellement de la carrière représentent déjà de lourds handicaps). Au risque d’être inaudible. Mais finalement, le problème n’est pas que l’on n’entend pas le MoDem et François Bayrou mais bien qu’on ne VEUT pas l’entendre quand on tend au manichéisme dans un concert qui réduit la tessiture à ses notes les plus aigues et les moins subtiles. Par facilité. Et il n’y a pas plus sourd que celui qui ne veut pas entendre.

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8 octobre 2010 5 08 /10 /octobre /2010 22:44

delhayeAlors que se préparent les Assises de Lyon qui verront la fusion définitive entre les Ecologistes (Verts et Europe Ecologie) avec l’objectif officiel d’une plus grande clarté et celui plus officieux mais autrement plus important d’assurer la continuité juridique nécessaire au financement public, Eric Delhaye, Président délégué de CAP21, tente un exercice de lecture quant à la participation future de son organisation dans cette machine à gagner écologiste, dans une tribune libre, après le départ en grande pompe du Mouvement Démocrate voilà quelques mois au lendemain de Régionales. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le mariage qu’il avait envisagé a du plomb dans l’aile. D’emblée, les périphrases alourdissent le beau projet sans parler du plus-que-parfait, synonyme d’horizon funeste :

« Nous avons été nombreux à espérer qu’un jour les écologistes seraient capables de se réunir dans un mouvement unique et indépendant. La dynamique d’Europe Ecologie et de ses coopérateurs pouvait laisser penser que cette heure était arrivée ».

 

Puis le couperet tombe net :  

 

« Si des partenariats sont envisageables, Cécile Duflot nous a clairement indiqué qu’il n’y avait pas de place pour CAP21 dans le processus fondateur du nouveau mouvement ou dans le bureau exécutif, ce qui a le mérite de la clarté et de la franchise. »

 

PhotoCorinneLepageC’est donc tout penaud que CAP21 est convié à rentrer à la niche. CAP21 a-t-il été sacrifié au nom de passé de Jupette de Corinne Lepage, dans un parti qui a toujours fait de son ancrage à gauche une donnée non négociable ? En d’autres termes, la dimension partisane l’a-t-elle emporté sur les considérations purement politicienne ? CAP21 a-t-il été victime de l’hégémonie des Verts dans cette nouvelle union comme semble l’indiquer Eric Delhaye quand il écrit :

 

« J’espère me tromper mais il est à craindre que l’opération Europe écologie ne devienne en réalité qu’un simple relookage des Verts et qu’il n’y ait aucune volonté de s’associer à un autre parti organisé comme CAP21 ni de chercher une synthèse programmatique avec l’écologie humaniste, progressiste et indépendante que nous représentons ».

 

Déjà vu déjà entendu ? Non, sans rire ! Ne reconnait-on pas là la rhétorique utilisée jadis pour quitter le MoDem ? Bien qu’il ne faille pas épargner les anciens Verts qui, selon toutes vraisemblances, sont hostiles de nature à toute alliance allant au-delà de leur périmètre gauche, ardents défenseurs d’un clivage… clivant, bloc contre bloc, pour s’assurer des retombées d’une bipolarisation qui rétribue à coups sûrs (une part négociée quand le PS est fort comme aux Régionales, ou un jeu d’égal à égal quand son principal partenaire est affaibli, comme lors des Européennes), il ne faudrait pas se laisser berner par la victimisation de CAP21, qui comme à son habitude reprend la bonne vieille litanie de l’éternelle victime.

 

Pour y voir plus clair, il n’y a guère besoin de remonter bien loin : l’après-présidentielles de 2007 suffit à y voir un peu plus claire nous aussi. Proche de l’UDF depuis sa création en 1996, CAP21 officialise sa collaboration avec François Bayrou au début de l’année 2007, quand Corinne Lepage comprend qu’elle n’aura pas les 500 signatures nécessaires pour briguer aux Présidentielles. Car il est une donnée qu’il faut bien comprendre pour saisir la trajectoire de ce parti : ce que veut Corinne Lepage, Cap21 le fait. Et vice versa. Elle qui dénonçait l’aura trop étouffante du « gourou Bayrou » avait de quoi méditer en observant la déférence qui lui est due par les adhérents du parti dont elle est la fondatrice et l’unique Présidente en 14 années d’existence.

modemCAP21 convole alors en justes noces dès mai 2007 avec le futur Mouvement. Pour autant, un premier désaccord, passé assez discret et malgré tout non des moindres, vient gâcher la fête : échaudé par les courants qui ont pu déstabiliser l’ancienne UDF et par la triste destinée des Verts, tiraillé de l’intérieur par moult sous-tendances, et dont Jean-Luc Bennahmias est le témoin le plus crédible, François Bayrou ne souhaite pas que CAP21 garde son identité et souhaite voir le parti de Corinne Lepage se fondre au projet humaniste du Mouvement Démocrate. CAP 21 ne l’entend pas ainsi, et Corinne Lepage avec lui. Lors du Congrès de Cap21 du 23 juin 2007, la participation du parti humaniste et écologiste à la fondation du Mouvement Démocrate est adoptée à la quasi-unanimité…sous-réserve de conserver une autonomie politique et financière. Corinne Lepage et son parti souhaite de toutes évidences garder une porte de sortie au cas où… L’occasion viendra pour prendre conscience que cette concession faite à la future eurodéputée sera une erreur. De fait, en décembre 2007, Cap21 devient membre fondateur du Mouvement Démocrate et conserve son autonomie politique et financière.

Par la suite, l’union sacrée fit son bonhomme de chemin. Corinne Lepage fut nommée vice-présidente du Mouvement en mai 2008 au lendemain des Municipales et fut en charge des Commissions mises en route pour élaborer une ligne programmatique. Les Européennes vont marquer un tournant.

eva jolyCorinne Lepage prend la tête de la liste du Nord pour ces Européennes aux côtés d’Olivier Henno. Dans le même temps, Eva Joly, pressentie pour rejoindre nos couleurs, se rétracte, après qu’on lui refuse la tête de liste d’Ile-de-France, dévolue à Marielle de Sarnez eurodéputée sortante. Cela aura toute son importance bien plus tard. Mais on ne le sait pas encore.

La campagne est un succès. Corinne Lepage en profite pour sortir un opus Vivre autrement, qui lui permet de théoriser sa vision de l’économie soutenable. Tout concourt à faire des ces élections une réussite puisque dans le même temps, François Bayrou cartonne en tête des ventes avec Abus de pouvoir. Les sondages donnent près de 15% au MoDem. C’est alors que la roue tourne… et Corinne Lepage avec.

Europe Ecologie, qui entre-temps, a récupéré Eva Joly fait une campagne besogneuse et efficace. Entraîné par un Cohn-Bendit qui en a vu d’autres, les intentions ne cessent de progresser. Fin mai, Europe Ecologie participe à l’anti-Bayrou envers et contre tout, le Président du MoDem qui décidément agace beaucoup. Avec la Gauche mais aussi la Droite républicaine, haro sur le Béarnais ; les conséquences sont immédiates dans cette micro-campagne. En quelques jours, Europe Ecologie connait une poussée quand les intentions de vote du Mouvement Démocrate s’effritent. Corinne Lepage qui se voyait bien accompagnée d’Olivier Henno à Bruxelles comprend rapidement que le pari est perdu. C’est alors que survient l’invraisemblable jeudi noir.

A quatre jours du scrutin, France2 organise le seul débat des Européennes de la campagne. Enregistré l’après-midi même, il accouche d’un bras de fer sanglant entre Cohn-Bendit et Bayrou. Personne le l’oubliera. On le comprendra plus tard, le leader d’Europe Ecologie avait parfaitement préparé son coup et tout tenté pour faire sortir le Président du Mouvement Démocrate de ses gonds. Non content de réussir son coup, il ne s’arrête pas là, et en sortant de l’émission contacte Corinne Lepage en jouant les offusqués. En vérité il jubile. Il flaire le coup de poker bien au-delà de ces Européennes. Le soir du 6 juin, Corinne Lepage passe par tous les états. Elle est remontée comme jamais. La rupture avec François Bayrou, qu’elle trouvait déjà trop hégémonique, est proche. C’est le point de rupture. Calmée, et rassurée par son entourage, elle reprend ses esprits pour finir la campagne. Mais pas pour longtemps  : dès le soir du résultat, qui est marqué par un résultat catastrophique pour le Mouvement Démocrate (8,5%), Corinne Lepage détonne sur les plateaux télévisés en sabordant le Mouvement et en expliquant que Europe Ecologie a réussi là où le Mouvement Démocrate avait échoué. Très négative, elle n’aura pas de mots trop durs pour condamner François Bayrou d’avoir choisi une campagne nationale là où les (rares) électeurs avaient décidé de choisir le débat européen et l’écologie.

86301 bayrouvanlerenberguneLa rupture est totale. Corinne Lepage comprend-elle que l’horizon 2012 est bouché, en tous cas en restant au MoDem ? Sans aucun doute. Pour elle, en tous cas, l’aventure est d’ores et déjà terminée. Lors du bilan fait au 133 bis rue de l’Université, l’ambiance est tendue, et Corinne Lepage continue l’offensive. François Bayrou quitte même le bureau, ce qui filtrera dans la presse. Nul besoin de se demander qui a livré l’info… Bennahmias qui n’a jamais véritablement apprécié la Présidente de CAP21 fulmine en face. Les conséquences sont immédiates : Corinne Lepage est priée d’arrêter les Commissions Démocrates, on lui demande de se faire plus discrète et d’avoir la critique moins acerbe. En privé, on lui demande certainement d’annoncer son départ après les Régionales histoire de ne pas plomber plus encore le Mouvement. Elle accepte le compromis et si elle soutient du bout des lèvres la candidature de son ancien numéro 2, Olivier Henno, pour les Régionales, elle n’oublie pas de donner son point de vue lors de la rencontre avec les militants et via le web crée un collectif Terre Démocrate qui ne fait aucun doute sur son objectif de scission : un des gestionnaires n’est autre que… Christophe Ginisty qui a claqué la porte du Mouvement quelques semaines plus tôt en faisant grand bruit.

Au Congrès d’Arras, elle fait un passage éclair, profitant de l’éclairage des médias pour dire qu’elle est persona non grata. Elle en profite pour dresser ses troupes contre le Mouvement lors du Module consacré aux Régionales, celles-ci reprochant à Jean-Marie Vanlerenberghe de ne pas avoir un « quotas » sur les listes du Mouvement Démocrate : la réponse est cinglante quand le sénateur rétorque qu’il avait toujours estimé que les adhérents de CAP21 étaient avant tout des adhérents du MoDem… Ambiance.

cap21 internetDurant la campagne, Corinne Lepage prend des contacts réguliers avec Cohn-Bendit et tire des plans sur la comète. Elle proclame préférer faire alliance à Bruxelles avec les Verts plutôt qu’avec l’ADLE. Pratiquant la stratégie de la terre brûlée, elle soutient dans l’Est la candidature d’Europe Ecologie contre la liste menée par Yann Wehrling, ancien porte-parole des Verts et membre du Mouvement Démocrate. Le soir des résultats du 1er tour, Corinne Lepage et Benhammias s’étripent en direct sur le plateau de France2 devant un auditoire médusé : les deux sont encore membres du même mouvement ! Quelques jours plus tard, Corinne Lepage annonce son départ du Mouvement Démocrate, décision entérinée par CAP21 quelques semaines plus tard. Dès lors elle est pressentie dans un rapprochement avec les Ecologistes.

 

Pourquoi alors, à peine quelques mois après ce rapprochement, la greffe n’a-t-elle pas prise ?

 

D’une part, il faudrait rappeler quelque chose : ce rapprochement n’avait rien de PROGRAMMATIQUE et d’IDEOLOGIQUE. Le 19 mai 2009, en pleine campagne des Européennes, Corinne Lepage n’avait-t-elle pas eu les mots les plus durs envers EE en expliquant qu’elle refusait de soutenir une liste qui comportait un « intégriste », disciple de Tariq Ramadan, qui ne s'oppose pas à la lapidation des femmes et qui oeuvre pour un communautarisme propre à défier la laïcité à la française ? Ou encore envers le grand écart entre Cohn Bendit et José Bové ?

  

 

Visiblement, toutes ces divergences la gênaient beaucoup moins une fois que les Européennes avaient rendu leur verdict.

Par ailleurs ces derniers mois ont vu une lutte de femmes : Cécile Duflot, héritière de l’écologie de cecile-duflotGauche et qui n’a jamais vu d’un bon œil l’arrivée de Corinne Lepage, Eva Joly, auréolée du succès des Européennes, et véritable fer de lance d’Europe Ecologie, et le Présidente de CAP21 qui a tenté de se faire une place. Las, les Universités d’été scellent son sort. Une fois de plus. En choisissant de faire d’Eva Joly la candidate pour les Présidentielles quand Cécile Duflot prenait la Direction du futur parti écologiste, les cadres écologistes condamnent Corinne Lepage : elle n’avait plus de place au jeu des chaises musicales. Sa déclaration à l’ouverture des Universités avait de quoi faire sourire :

« Je crains un virage trop à gauche, avec par exemple la position des Verts sur les retraites et cela me paraît très loin des positions de Daniel Cohn-Bendit. D’ailleurs, le recul de Daniel Cohn-Bendit au sein du mouvement est pour moi un aveu d’échec. »

 

Aujourd’hui les adhérents de CAP21 déchantent, une fois de plus. Les voilà sans ressources. Seuls avec leur eurodéputée, sans avoir de chance de voir leur voix se faire entendre à l’avenir. Leur candeur fait sourire : comment ont-ils pu croire un seul instant que les Verts n’allaient pas être dominants dans cette nouvelle structure écologiste ? Comment ont-ils pu penser que Duflot et Joly allait laisser l’oxygène nécessaire à Corinne Lepage, pour incarner une rivale dangereuse ? Face au cynisme de leur présidente, les adhérents de CAP21 ont pêché par naïveté. Ingénus, ils n’ont pas vu le cynisme de la trajectoire de l’ancienne Jupette. Les ambitions présidentielles de Corinne Lepage sont à présent un souvenir lointain et un rêve inaccessible. Corinne Lepage ou comment tout sacrifier pour sa trajectoire personnelle. C’est amusant : c’est exactement ce qu’elle reprochait il y a quelques mois à François Bayrou. Ou de la déclinaison éternelle de l’ironie du sort…

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20 juin 2010 7 20 /06 /juin /2010 19:14

En mars dernier, alors que l’ancien Premier Ministre lançait son futur appel du 19 juin, j’avais tenté d’y voir plus clair, de la part d’un homme qui en condamnant le Gouvernement et en faisant fi des clivages droite/gauche marchait sur les plates-bandes du MoDem… Voici mon point de vue.

« Je suis mal à l’aise avec la politique du Gouvernement ». Revenir sur le paquet fiscal. Balayer les clivages politiques. Etre plus équitable socialement. Serait-ce martine Aubry ou bien François Bayrou qui se fait alors entendre ? Ni l’une ni l’autre. Et pour cause : ces prédications sont de Dominique de Villepin, qui sous la forme de teasing, est venu annoncer la création de son parti pour le 19 juin.

Le réquisitoire de l’ancien Premier Ministre est d’une écriture fine et acérée, une conviction et une rhétorique de qualité. L’Homme de Lettres qu’il est, féru de la poésie enivrante de Saint John Perse a ébloui  les oreilles et ravi les papilles de ceux qui veulent un changement de cap à Matignon via l’Elysée.

Par moments, en fermant les yeux, l’on avait même l’impression qu’il pouvait, encore plus que la Gauche, en proie à ses problèmes d’ego, et que François Bayrou en pleine resttructuration, incarner l’Opposition à Nicolas Sarkozy.

113531-aaa-villepin-begag-une 29012Mais une anicroche vint gâcher la fête : une question de journalistes, eux qui avaient perdu l’habitude de poser les bonnes. Quand on demanda à l’orateur hors pair ce qu’il avait voté pour les Régionales, il répondit : « Je suis resté fidèle à ma famille politique ». Double faute. Non seulement il a voté pour le camp qui a subi une de ses plus lourdes défaites électorales depuis des décennies mais surtout il est en contradiction totale avec ce qu’il entend proposer : le refus des clivages. « Ma famille »… l’aveu est de taille. Faites ce que je dis et non pas ce que je fais. L’entreprise de Villepin ressemble donc à une impasse qui n’est as là pour réunir les Français quelle que soit leur étiquette politique, mais pour réunir les militants égarés de la Droite, qui n’ont plus que la défiance à l’égard du président en place.

Dès lors, comment imaginer que Dominique de Villepin puisse faire perdre sa famille au point de se présenter en 2012 contre Nicolas Sarkozy lui-même ? Comme dans les films de Claude Chabrol, les couteaux sont aiguisés, prêts à fonctionner, mais à table, le sourire est de guise. Plus le vernis est épais et plus la croûte est assurée… Le diner était presque parfait.

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23 mars 2010 2 23 /03 /mars /2010 20:41

Inaudible. C’est assurément l’adjectif qui est le plus souvent revenu dès qu’il s’est agi d’évoquer le MoDem durant les Régionales. Autant le FN, le Front de Gauche et Europe Ecologie ont parfaitement résisté à l’hégémonie médiatique du PS et de l’UMP, autant le MoDem est tombé dans un lourd anonymat, si ce n’est pour dire qu’avec 4% d’intentions de votes, il s’écroulait. A cela, plusieurs raisons.

Des raisons extrinsèques tout d’abord. Force est de constater que fragilisé par la catastrophique fin de campagnes des Européennes, le MoDem n’a plus représenté un danger et une cible pour nos adversaires. Or en politique, il est un fait avéré : l’on existe par soi mais aussi par le prisme des critiques de ses opposants. Si le reste de l’échiquier vous occulte, vous n’existez pas. Vous n’existez plus. C’est bien ce qui est arrivé ici. Contrairement à ce que certains  optimistes avaient cru, le jeudi noir du 4 juin aura laissé des traces durables. Il était vain de parler programme avec les citoyens : ressortait immanquablement le sinistre épisode de l’émission d’Arlette Chabot ou encore un « Ah, Bayrou. Il est foutu », implicite référence à la débandade des Européennes.

Pire le MoDem est devenu source de railleries : Canteloup et les Guignols étant les plus hardis à se délecter, Bayrou confondant MoDem et Midem pour le premier, et la marionnette PPD disant à quelques jours du scrutin « Si vous ne savez pas qui choisir, votez MoDem. Non, on plaisante. Faites-le sérieusement tout de même »… Or l’humour et la parodie sont des armes à double tranchant : ils peuvent vous rendre sympathique comme ce fut le cas pour Chirac en 1995 ou ridicule. Aucun doute là-dessus : c’est le ridicule qui ressortit pour notre chef de fil et toute la crédibilité de notre discours qui partit en fumée.

PujadasEnfin, les médias nationaux ne nous ont clairement pas aidés. A part France 3 Régional, qui a respecté les temps de parole ? Le CSA a été d’une inertie stupéfiante. Certes, il est difficile de réguler compte tenu du nombre de régions et de listes. Mais donner aussi peu de place à u mouvement qui autour de son leader a réuni presque 7 millions de voix au 1er tour de la dernière Présidentielles relève tout bonnement du déni de démocratie. Afficher pendant 2 secondes l’ensemble des candidats d’une région à la fin d’un sujet de 2 minutes consacré à une seul d’entre eux n’est pas respectueux de l’équité de temps de parole des candidats. Pire, quand ils se sont intéressés à nos candidats, fichtre, les médias ont pris la peine de n’évoquer que le futile (une tête de liste noire, la belle affaire !), le polémique (Ségolène Royal qui « ouvre » sa liste à des MoDem peu scrupuleux) ou le carrément hostile (Corinne Lepage pour vous servir). Le traitement médiatique de cette campagne fut donc tout proprement scandaleux et le CSA serait avisé de s’en inquiéter en imposant des règles strictes et proportionnelles  la réalité électorale du pays.

Pour autant, est-on exempt e toute reproche quant à cette absence médiatique ou notre manque de crédibilité ? Assurément, non ! Les raisons intrinsèques sont tout aussi accablantes.

Et ceux qui de l’intérieur ont massacré le mouvement, fossoyeurs frustrés de ne pas avoir été choisis, ces illuminés de la démocratitude qui n’ont visiblement jamais lu Platon pour entrevoir d’une manière aussi utopique le fonctionnement d’une démocratie, et qui ont le culot de claquer la porte, grossièrement et vulgairement de manière à faire du bruit, portent une lourde part de responsabilité.

GInistyQue François Bayrou ait trop présidentialisé notre Mouvement est une chose. Que l’on reproche un manque d’émergence parmi nos rangs tout autant. Que notre Mouvement, naissant doit-on le rappeler, balbutie, tâtonne, et ne soit pas encore professionnel dans ses procédures… pourquoi pas ! Mais quel est l’intérêt de le brailler sur la place publique si ce n’est pour vouloir casser, briser et tout simplement détruire ? Qui sont ces serpents qui sifflent sur nos têtes ? Souvent ce sont ceux qui snobent les marchés, éblouissants dans l’aphasie en séance de travail ou prolixes pour la mise en scène de soi, avares en idées éclairantes mais tellement enthousiastes dans la maîtrise de l’Azerty-Qwerty, bien lâches derrière un écran et un simple clavier. Ceux-là portent lourdement la responsabilité de nos échecs à répétition.

Toutefois, il ne faudrait pas non plus se voiler la face : si certains ont pu œuvrer en leur qualité de contestataires, c’est qu’ils avaient des raisons légitimes de le faire (non pas en public… mais en interne, nuance !). Les priorités du MoDem doivent se concentrer sur l’émergence de nouveaux talents. Ce Mouvement ne peut être à l’image d’Europe Ecologie une « écurie » représentée seulement par seulement 1 ou 2 personnes (Eric Quiquet, leader vert à Lille ironisait sur la difficulté à boucler les listes pour son parti avec cette boutade : « Si ça continue comme ça, on aura bientôt plus de places éligibles que de militants »). Faire vivre le parti à l’interne est ne chose. Mais encore faut-il savoir le faire vivre vers l’extérieur. C’est le principe même de la communication. Et avec la nécessaire confiance de Paris et des exécutifs. Le Conseil national de samedi devra tenir compte de ces impératifs.

Il reste deux années au MoDem pour représenter une voix. Et ne plus être inaudible. C’est d’autant plus important dans un monde médiatique où il n’y a pas plus sourd que celui qui ne veut pas entendre.

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  • : Les Nouveaux Démocrates
  • : Enseignant et essayiste. Auteur de La Croix et la bannière sur la rhétorique des intégristes à propos du mariage pour tous (Golias, novembre 2012) et de Mariage pour tous vs Manif pour Tous (Golias, mai 2015) Auteur également d'articles sur Prochoix, la revue tenue par Fiammetta Venner et Caroline Fourest (n°57,58,59, 63 & 66) Ancien membre du Conseil national du MoDem et candidat aux Régionales 2010 et législatives 2012. Démission du MoDem en octobre 2012. Blog d’un militant du Mouvement Démocrate (MoDem).
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