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12 avril 2011 2 12 /04 /avril /2011 21:57

La Présidentielle a toujours suscité un intérêt particulier. En témoigne la faible abstention par rapport aux autres élections, puisque c’est le seul scrutin à faire se déplacer autant de personnes autour des urnes : sur les quatre derniers scrutins, la participation moyenne des européennes est de 45,72%, pour les législatives 69,62%, pour les régionales 58,23%, pour les cantonales 57,55, pour les municipales 69,4 et enfin pour les présidentielles 80,33%... Il n’y aura pas de photo finish. Notre cinquième république, par la volonté d’un seul homme amoureux devant l’éternel du plébiscite, s’articule entièrement autour du scrutin présidentielle. Même si en théorie, le président est celui qui a le moins de pouvoir politique interne. Mais doté d’ubiquité, omniscience et d’omnipotence, Nicolas Sarkozy a été à la hauteur de la participation du scrutin… au moins quantitativement. C’est toujours cela.

FN01 - courbe sondageToujours est-il qu’à quelques mois de cette présidentielle, c’est-à-dire 12 mois exactement, la campagne a donc été officiellement lancée. Et cela ne date pas d’hier ! C’est toujours malheureux dans une démocratie de voir la spectre de la prochaine élection poindre alors que le mandat n’est pas terminé. On se lamentait déjà des silences de DSK dès 2009… Conséquence du passage à un quinquennat qui n’ a visiblement pas que des avantages . Il n’y a qu’à voir Obama aux Etats-Unis pour s’en convaincre : Il a prêté serment en janvier 2009 et annonce sa candidature à sa succession en mars 2011. Le système des démocraties modernes a de quoi laisser songeur : les hommes politiques sont des candidats perpétuels, et consacrent au moins autant de temps si ce n’est plus à faire campagne qu’à se placer au chevet des Français. L’électif a pris le pas sur l’exécutif et le législatif. Il ne faut pas s’étonner que les Français rechignent à aller voter alors que la chose politique ne les a jamais autant intéressés.

femme fatale200Mais c’est justement là que le bât blesse : cet intérêt est en trompe l’œil. On se souvient des éditoriaux dithyrambiques sur la participation en hausse en 2007… Elle ne fut guère suivie par la suite. Ce fut l’unique exception d’une constante macabre qui plombe nos élections depuis plus de quinze ans : chaque scrutin voit le nombre de suffrages exprimés décroître de manière drastique depuis quinze ans, battant records sur records. On le sait : le sursaut de 2007 n’avait rien de démocratique : il n’était que la conséquence de la peoplisation du scrutin présidentiel avec deux candidats qui rendaient grâce à la sentence si savoureuse de Fabius anticipant sa défaite aux primaires socialistes d’alors : « Je préfère dire Voici mon programme que mon programme, c'est Voici » (Le Temps, le 6 septembre 2006). Cette sur-médiatisation des hommes et de l’intime sonnait avec l’évaporation des idées et de la politique, ou plutôt qu’évaporation, je choisirais le mot « cosmétisation ». On se souvient d’une Ségolène Royal, qui choisissait les siennes en fonction du succès de celles des autres, qu’elle enrubannait d’un ruban rose pour lui donner des teintes socialistes. Les drapeaux français aux fenêtres pour copier les coups de pieds nationalistes donnés sous la table par Sarkozy pour flatter l’électorat lepéniste, la sixième république réclamée par Bayrou, comme ce fut parfaitement expliquer dans La Femme fatale, l’opus sulfureux de Bacqué et Chemin qui fut poursuivi en Justice par l’intéressée, sans n’avoir jamais été convaincu de quelconque digressions imaginaires… mais quel électeur a-t-il véritablement lu les programmes des 9 candidats à l’élection de 2007, afin de procéder à un choix objectif ? Qui l’a déjà fait dans une autre élection ? Force est de constater que le citoyen se contente des tracts et des messages publicitaires qui y sont martelés. Pire il se réfère à la seule chose qui vaille dans ce paysage politique dressé par les médias : l’étiquette.

internet1Fi des programmes, des idées et des valeurs. Trop techniques, trop développés, jargonnant… Tous les reproches ont été faits pour céder à la procrastination et à repousser au lendemain la lecture des programmes. A la Saint Glin-glin au final. Ne restent alors que les impressions, le qu’en dit-on et qu’en dira-t-on, la couleur politique… Bref tout ce qui en somme classe un candidat pour le reconnaître mais assurément pas pour le connaître.  A l’heure où l’information est à portée de mains pour le citoyen, symbole de la réussite d’une démocratie, ce dernier se complait à la paresse, à l’essentiel, à l’instantané, et finalement, n’en connait pas davantage sur les programmes et nos élus, que ses ancêtres dotés du minitel ou encore d’une bonne vieille encyclopédie. Pire, il croit être mieux informé quand il se trouve surtout intoxiqué… Les nouvelles technologies rendent l’information accessible à tous, pléthorique et même exhaustive à certains égards. Encore faut-il que le citoyen sache faire la part des choses, dispose du temps et de la culture pour confronter les flux de renseignements qui lui parviennent afin de dégager une information. Car l’information n’est pas la transmission d’un discours, mais le produit de la vérification de l’authenticité et de la véracité de celui-ci.

A ce petit jeu-là, qui connait véritablement la politique économique du PS qui scande les dérives du capitalisme ? Propose-t-il comme il semble le faire croire une alternative à ce monde qui se résumerait à une économie de Droite et une économie de Gauche comme il prétend le dire ? Ou accepte-t-il la même loi du marché que l’UMP en prétendant la moraliser ou en changer les principes, ce que d’aucuns connaissant un tant soit peu la loi de Bruxelles et de Strasbourg ne peut que s’en gausser ?

PSC’est dans ce contexte de flou artistique, où l’estampillage domine fièrement, où la forme se substitue à la forme, où être socialiste évoque davantage de choses que de proposer une mesure concrète susceptible d’être utile au citoyen, que le PS a présenté son « programme » la semaine dernière. Nous reviendrons plus tard sur son contenu. Et plus bas ici même sur sa réelle influence sur le candidat à venir. Mais d’ores et déjà, défiant toutes les lois du réalisme et de la crédibilité, un sondage est paru sur l’impression ressentie par la population à propos de ce programme. Trois jours après sa parution ! Les passionnés de politique fiction l’ont rêvé, BVA l’a fait pour eux : en temps réel, le PS sort son programme et croit deviner qu’il va enthousiasmer tout le monde ! Alors même que pas un Français n’a lu une ligne de programme depuis des lustres, alors même que les citoyens rechignent à lire même les tracts, de plus en plus légers distribués sur les marchés ou reçus dans les boîtes aux lettres, BVA croit bon de faire un sondage trois jour après sa revue médiatique d’un programme, dont on ne sait pas quel sera le guide, pour une élection qui aura lieu dans 12 mois ! Mais de qui se moque-t-on ? Veut-on déjà nous écrire la présidentielle à venir ? En 2002, on nous avait vendu un Jospin/Chirac qui fut massacré par une abstention critique, une dispersion des candidatures (17 candidats !) et un Premier Ministre d’alors qui a fait une bien drôle de campagne pour un futur président (ouvrir une campagne socialiste en prétendant qu’elle portera mal son nom… à Lille qui plus est, boutades en séries jusqu’au délit de vieille gueule, et j’en passe). En 2007, le Royal/Sarkozy avait été quelque peu secoué par un François Bayrou désireux de montrer que Mougeotte et Le Lay, grands commandeurs de TF1 et voyants extralucides voulant imposer leur marc de café, avaient tort de croire que le seul choix acceptable pour notre République se situait dans l’alternative unique UMP/PS. Veut-on à nouveau nous imposer un canevas, tout prêt, avec un ennemi annoncé, en la personne de Marine LePen pour nous boucler la trilogie du film annoncé ?

cigaleAu-delà de la réception de ce programme, si tant est qu’il y ait déjà eu réception, encore une fois, que penser de cette opération médiatique du PS ? Comment peut-on imaginer un seul instant que le futur candidat du PS, va s’adapter sans changer une ligne à cette feuille de route sauf à faire croire que la primaire socialiste n’a que faire des valeurs et pourrait se résumer à un simple casting ? A ce jeu-là, Ségolène la sémillante l’emporte devant Martine, et Hollande le Dukanisé explose DSK… En sortant son programme, le PS vient de dévoiler une réalité bien triste pour notre démocratie : le choix du candidat n’est qu’une affaire de nom, d’image que dis-je de sondage puisque le fond est lui statué 12 mois avant… Le reste ne serait que cosmétique…

La bataille est lancée : au-delà des couleurs partisanes, des valeurs que défendent chacun, et des personnalités qui s’opposeront , les futurs candidats devront en outre ferrailler à la présidentielle qu’on veut imposer aux Français. Dans ces conditions, la loi électorale française sent le moisi. La Présidentielle commence douze mois avant ? Comptons dès à présent le temps de parole… ou plutôt le temps de « couverture » médiatique accordé à chacun. Car à ce rythme, les fourmis risquent d’être dépourvues quand la bise sera venue… Les cigales, fort fardées, n’auront plus qu’à adouber les voix qui auront fait leur destinée…

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  • : Les Nouveaux Démocrates
  • : Enseignant et essayiste. Auteur de La Croix et la bannière sur la rhétorique des intégristes à propos du mariage pour tous (Golias, novembre 2012) et de Mariage pour tous vs Manif pour Tous (Golias, mai 2015) Auteur également d'articles sur Prochoix, la revue tenue par Fiammetta Venner et Caroline Fourest (n°57,58,59, 63 & 66) Ancien membre du Conseil national du MoDem et candidat aux Régionales 2010 et législatives 2012. Démission du MoDem en octobre 2012. Blog d’un militant du Mouvement Démocrate (MoDem).
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