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3 juillet 2008 4 03 /07 /juillet /2008 20:55

Alors, quelles solutions permettraient aux ZEP d’utiliser les fonds qui lui sont octroyés de manière efficace, sociale et égalitaire ?


Plusieurs points sont à revoir :

 


Tout d’abord, il est question d’argent. Beaucoup de moyens sont employés, notamment dans des heures supplémentaires pour des projets, des parcours d’accompagnement (PPRE), des aides à l’apprentissage, des aides au travail… Mais que fait-on au juste durant ces heures ? Aider l’élève en difficulté à faire son devoir de maths ? Vérifier qu’il a bien « noté tous ses devoirs » ? Lui corriger les fautes dans son cahier ? Certes, tout cela est utile. Mais est-ce bien suffisant quand l’illettrisme guette à chaque coin de rue ? Ne faut-il pas consacrer ses heures à des fondamentaux aussi rudimentaires que la conjugaison, le calcul, et même la calligraphie (doit-on préciser que l’Education Nationale se voit solliciter des « graphothérapeuthes » à plus de cent euros par heure pour certains élèves qui avouent simplement savoir écrire mais ne pas en avoir « le courage » ?).  Il faudrait moins focaliser sur les moyens et notamment cesser avec ce « radotadage » : « il faut donner plus de moyens ». C’est faux ! Des moyens, il y en a. Faut il encore les employer avec efficacité, respectabilité et conscience. A ce titre, consacrer la moitié d’un emploi du temps (9 heures prof et/ ou 17 heures CPE) à la responsabilité de « coordonateur ZEP » ressemble fort à une escroquerie financière et philosophique…


Vouloir à tous prix consacrer les moyens dans les nouvelles technologies, entre tableau interactif, magico-mégalo cosmique, et autres salles pupitres à foison (2 dans un établissement ZEP de 280 élèves !!!), quand nos élèves ne font pas la différence entre un nom et un adjectif, est une hérésie des plus crapuleuses ! La technologie doit être au service des savoirs, mais ne doit en aucun cas se substituer à eux ! Rappelons-nous de ce débat organisé par Marianne en Septembre 2007 mettant aux prises François Bayrou et Alain Finkielkraut, qui rappelaient à l’unisson que l’informatique est un outil formidable pour celui qui détient le savoir, mais un poison pour l’ignorant qui se complaît alors dans l’art du « copier-coller »…

 

 

La ZEP doit être un lieu d’ouverture. Mais ce que les pédagogoles entendent par là c’est s’ouvrir au Rap, au slame et à la culture des banlieues et des ghettos. Mais alors où est l’ouverture si on complait l’enfant des quartiers dans son environnement, sa culture, ses repères ? Parlait-on alors de l’ouverture des professeurs ? Mais qui est là pour apprendre, découvrir ? Le prof ou l’élève ? L’ouverture doit se faire par la culture que ces élèves en difficulté n’ont pas, c’est-à-dire la connaissance des Anciens, de la littérature qui a passé le cap toujours critique de devoir se justifier pour exister, celle qui a survécu malgré l’épreuve du temps. D’autant que rien ne se crée. Tout n’est que référence à ce qui lui a précédé, par copie pour les moins talentueux, par réaction pour les plus rebelles, par parodies ou pastiches pour les funambules, par intertextualité pour les plus habiles. Le moderne ne vit et n’existe, seulement si l’on se réfère à ce qui a préexisté. C’est la base de la littérature et du savoir. N’est subversif, novateur, avant-gardiste que celui qui rompt avec l’Ancien. Et pour cela, il faut connaître l’Ancien. CQFD. Ainsi la littérature classique, les Arts et les savoirs scientifiques qui ont fait la richesse de nos siècles passés doivent être la sève des fleurs que l’on voit pousser et prospérer dans les salles de classe. La seule et unique essence dont ils pourront s’enorgueillir en société ou lors d’un entretien d’embauche…

La Zep a aussi cette fâcheuse tendance à vouloir aider… tout le temps et pour n’importe quoi. Un élève ne comprend pas la consigne à l’écrit, et on lui explique systématiquement à l’oral. Mais qu’en sera-t-il quand il sera devant sa copie de brevet, ou encore au lycée. Aider, être le tuteur de la fleur est nécessaire, mais petit à petit, la Zep doit apprendre l’autonomie. C’est l’autonomie qui fixe la réussite au lycée et encore plus à l’université.

 

Mais un des points névralgiques qui stigmatisent toute bonne intention, toute volonté d’aider, toute initiative pédagogique reste la notation. Combien de professeurs se prostituent pédagogiquement, plus ou moins consciemment, en notant non par rapport à une production mais par rapport au contexte, aux difficultés, au découragement ? Combien de fois faudra-t-il encore entendre qu’un zéro va démoraliser un élève ? La note n’est pas le jugement de l’enfant ou de l’adolescent, encore moins de l’être humain qui est devant nous. La notation est le jugement ponctuel et cartésien d’une performance étable à un moment T et qui répond ou non aux exigences d’une consigne. Si la note est mauvaise, c’est qu’il y a encore du travail à accomplir ! Pourquoi « psychologiser » la note quand celle-ci est un relevé froid, mathématique, a priori incontestable, mais ô combien utile ? Va-t-on cesser de prendre la température d’un malade qui a de la fièvre car s’il apprend qu’il a 40° cela va le démoraliser ? Pourquoi des élèves illettrés se retrouvent avec 9 de moyenne générale parce qu’au fond « ils sont gentils » ? A combien d’élèves fait-on croire que le lycée est jouable quand pertinemment l’on sait qu’on les envoie au casse-pipe ? Combien d’hérétiques vont-ils encore s’exprimer en conseil de classe pour condamner les enseignants notant « trop justes » selon des critères dignes de « l’Ecole des fans » ? A ceux qui confondent réalisme et cynisme, je rappellerai que le cynisme consiste avant tout de croire et défaire croire que 80% d’une classe d’âge aura nécessairement le BAC…

 

Enfin et surtout, il sera question de civisme. Pourquoi est-ce dans les établissements en difficulté que la loi est la plus laxiste ? Bien au contraire, les élèves « perturbateurs » qui hantent les murs des collèges en Zep n’ont pas toujours reçu l’éducation adéquate, c’est-à-dire, un cadre, des limites, des consignes à respecter. N’est-ce pas alors à l’école de rappeler ces fondamentaux ? N’est-ce pas à elle de montrer que les droits dépendent naturellement des devoirs et que sans l’un on ne peut prétend avoir l’autre ? Il n’est pas question de faire de l’école une prison, un ghetto militaire pour encadrer des « barbares » ; il est juste question de montrer ce que sont les règles, et les enfants des ZEP en ont certainement plus besoin ici qu’à Henri IV. Rappeler que le tutoiement d’un professeur même au détour d’un « vas-y » en apparence anodin, même s’il est « sorti sans le faire exprès », même si le « c’est pas de ma faute » est une litanie qui radote pour justifier tout acte qu’il soit grave ou insignifiant, n’est pas une chose acceptable dans l’école de la République. Le professeur est le supérieur de l’élève dans la salle de classe, le référent, celui qui domine non par la violence ou l’arrogance mais par le savoir. On lui doit à ce titre honneur et respect. L’élève lui mérite le respect parce qu’il suit les règles, qu’il travaille, et qu’il s’exprime de manière courtoise, appropriée, en droite lignée de l’elocutio aristotélicienne.

 

J’aurai pu aussi évoquer tous ces fonds employés aux sorties scolaires pour l’orientation, la connaissance de l’entreprise, ou encore dans les parcs d’attraction (sic), non que les deux premières soient inutiles mais bien trop nombreuses et surtout imposées à tous quand elles seraient bénéfiques à certains seulement. Mais mon analyse est déjà suffisamment longue et je l’espère suffisante pour montrer que la ZEP dispose de multiples ressources, qu’il n’est nullement question de la détruire mais au contraire d’en tirer le meilleur profit.

Les ZEP ont les moyens matériels et philosophiques pour aspirer à plus d’égalité, au lieu de demander toujours et plus, dans un esprit keynésien, sans pour autant monter d’efficacité. L’égalitarisme est une ornière dans laquelle s’est réfugiée la ZEP actuelle et qui aboutit à une accentuation des inégalités sociales. Dès lors que les corrections seront faites, plus personne ne remettra en cause la carte scolaire, dont le démantèlement multiplie de manière exponentielle la différence entre riches et pauvres. Bien au contraire, enviée, les plus aisés demanderont des dérogations pour y voir s’épanouir leurs progénitures. Les plus bornés et stupides continueront sur leurs modes. Mais c’est bien connu : il n’y a que les c*** qui ne changent pas d’avis.  

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  • : Les Nouveaux Démocrates
  • : Enseignant et essayiste. Auteur de La Croix et la bannière sur la rhétorique des intégristes à propos du mariage pour tous (Golias, novembre 2012) et de Mariage pour tous vs Manif pour Tous (Golias, mai 2015) Auteur également d'articles sur Prochoix, la revue tenue par Fiammetta Venner et Caroline Fourest (n°57,58,59, 63 & 66) Ancien membre du Conseil national du MoDem et candidat aux Régionales 2010 et législatives 2012. Démission du MoDem en octobre 2012. Blog d’un militant du Mouvement Démocrate (MoDem).
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