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16 décembre 2011 5 16 /12 /décembre /2011 19:38

La campagne de François Hollande prend des allures de chemin de croix. Et semble atteinte du syndrome Merlène Ottey. Qui est Merlène Ottey, me direz-vous ? C’est une athlète d’origine jamaïcaine (aujourd’hui naturalisée slovène) qui avait le sobriquet de "reine de bronze" tant elle gagnait toutes les étapes intermédiaires, mais que l’émotivité la condamnait irrémédiablement à chaque grand championnat. Pour le PS, c’est soupe champenoise aux cantonales, régionales et municipales, mais soupe à la grimace pour la présidentielle… depuis 1995.

 

Manifestations d'enseignants, le 15 décembre 2011, à Paris (Sipa)

Manifestations d'enseignants, le 15 décembre 2011, à Paris (Sipa)

 

Aujourd’hui, les enseignants sont dans la rue. L’école, c’est habituellement la chasse gardée du PS. Parfois revendiquée avec une certaine arrogance quand, par exemple, Yves Durand et Jean-Marc Ayrault, députés PS, écrivent une tribune au "Monde" le 15 mai 2010, intitulée "Réveiller le désir d’école", qui fut ensuite envoyée aux professeurs en débutant par un stupéfiant : "Il existe un 'pacte séculaire' entre le projet socialiste et l’éducation"?

 

Le PS oublie la question de l'évaluation

 

Mais où est donc passé ce "pacte séculaire" aujourd’hui, 15 décembre, alors que les enseignants manifestent contre le projet d’évaluation dessiné par Luc Chatel ? Où sont les positions tranchées de François Hollande sur la question ? Les propositions ? On a entendu à l’envi les 60.000 postes créés, pour une somme variant suivant les jours et suivant surtout la bonne foi, de 2,5 à 7,5 milliards d’euros. Qu’en est-il de cette refonte de la mission des enseignants dont on nous parle tant, en guise de contrepartie, mais qui s’efface derrière les banderoles de ceux qui battent le pavé ?

 

La réalité c’est que le projet du PS ne prévoit rien sur l’évaluation des enseignants. Pire : il ne fait que préconiser la refonte de leur mission contre rétribution, ce qui, à écouter les débats de la primaire, revient à dire aux enseignants qu’ils travailleront davantage dans les établissements scolaires et que leur revalorisation se fera quand les finances le permettront. Autrement dit, travailler plus, pour ne pas gagner plus. Et de distiller dans l’esprit des citoyens que décidément les profs sont des glandeurs ! Ah il est beau le pacte séculaire entre l’école et le PS !

 

Attention, métier en évolution !

 

Pourtant, la question de l’évaluation des enseignants est capitale et fait justement partie intégrante de l’évolution du métier. Le diagnostique de Luc Chatel n’est pas faux : l’évolution actuelle est inique. Elle se passe à l’ancienneté, et le professeur est inspecté trois fois dans sa carrière. Pour autant, donner la charge d’évaluer les enseignants aux chefs d’établissements tous les trois ans, revient à calquer le système anglo-saxon, qui transforme le principal ou le proviseur en chef d’entreprise.

 

Or un chef d’établissement n’est pas un chef d’entreprise. Et ce pour une raison très simple : son expertise se limite à l’incitation de projet et à la gestion administrative des enseignants quand l’évaluation de ces derniers nécessitent également de parler discipline et pédagogie. Et en quoi un ancien CP ou professeur de SVT aurait une connaissance dans la manière de transmettre le savoir en anglais ou en mathématiques ? Cela n’a aucun sens.

 

Qui plus est, on distille dans l’esprit que le "meilleur professeur" est nécessairement celui qui travaille en équipe, qui participe à kyrielles de projet, qui accepte de faire des heures supplémentaires… Parce que les professeurs qui sont déjà soucieux de faire le travail dans leur classe, avec leur méthode, leur démarche, leur relation personnalisée avec les élèves et qui n’entrent pas forcément dans le moule du projet d’établissement sont nécessairement des professeurs inefficaces. On le voit, les clichés ne sont pas seulement là où on les pointe du doigt dans les médias ou les discours politiques.

 

Besoin urgent de pédagogie

 

La réalité c’est que le malaise provient dès le départ de la formation initiale qui oublie la dimension pédagogique : la création d’une épreuve sur dossier de didactique au Capes est une vaste fumisterie qui fait prendre des vessies pour des lanternes. Et qui n’évalue surtout en rien la capacité d’un professeur à adapter une pédagogie adéquate et à résister à une classe de 30 élèves dont 5 souffrent d’illettrisme.

 

Tant que des stages, plus nombreux, ne seront pas obligatoires et qu'un entretien professionnel, véritable cette fois-ci, avec plusieurs intervenants, ne viendra pas tester le candidat pour ne pas évaluer seulement son savoir universitaire mais ses motivations et sa capacité à gérer les futures situations (comme on le ferait dans n’importe quel profession), les dysfonctionnements perdureront.

 

La formation et l’évaluation sont liées et, à y regarder de plus près, le chef d’établissement n’a nulle incidence sur l’une ou l’autre. Et puis, finalement, à quoi servirait cette nouvelle évaluation ? Uniquement à fixer la rémunération ? Étrange application de la rétribution au "mérite" que l'on veut aveuglément appliquer à un professeur comme on le ferait à un camelot tentant de revendre sa marchandise.

 

Dans "2012, État d’Urgence", François Bayrou, ne disait pas autre chose. Pour lui, il doit y avoir une "étude systématique du travail accompli par les enseignants qui obtiennent les meilleurs résultats avec le même type d’élèves. Et le partage de leur démarche pédagogique". Toutefois, "l’évaluation ne doit pas être autre chose que la méthode pour repérer les pépites dans la mine d’or."

 

 

François Hollande lors d'une conférence de presse au salon de l'éducation à Paris le 27 novembre 2011 (F. DUFOUR/AFP)

François Hollande lors d'une conférence de presse au salon de l'éducation à Paris le 27 novembre 2011 (F. Dufour/AFP)

 

S'engager

 

L’école n’a pas à être rentable ; elle n’a de priorité qu’à être efficace. Et la mutualisation des savoirs et des méthodes − encore faudrait-il donner les moyens, non pas l’argent, mais la liberté pédagogique pour que la transmission s’opère − n’a pas à devenir la corollaire de la rémunération. Sauf risque de voir un système plus corrompu qu’il ne l’est déjà.

 

Mais qu’en pense donc François Hollande ? Que préconise-t-il, lui ?

 

"Pour beaucoup d'enseignants, être évalués par le seul chef d'établissement (...) pose un problème. (...) Les enseignants veulent être évalués par des inspecteurs ou par des pairs qui sont de la même matière"a affirmé François Hollande. "Nous pourrons, avec la discussion avec les syndicats d'enseignants, trouver des formules plus originales, y compris collectives"

 

Moui. Très productif. Si ce n'est que, lorsque l'on est désigné par les sondages comme un des candidats les plus en vues, si ce n’est le favori, pour la présidentielle, l’on est en droit d’attendre de lui davantage de choses que ce lourd silence, car ce n'est rien dire qu'affirmer cela ou plus précisément se réfugier dans une politique de l’autruche, histoire de ne froisser personne... Ou presque !

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14 décembre 2011 3 14 /12 /décembre /2011 19:37

Il l’avoue lui-même : l’expression lui fait horreur, lui, l’agrégé en lettres classiques qui voit en cet anglicisme l’expression même de ce qu’il abhorre. Il n’empêche, comme l’explique Robert Rochefort, vice-président du MoDem, député européen, et ancien directeur du CREDOC, l’expression sonne bien… en tous cas bien mieux que "fabriqué en France".

 

Francois Bayrou à Pau, durant son premier meeting le 10 décembre 2011 AFP/PIERRE ANDRIEU

Francois Bayrou à Pau, durant son premier meeting le 10 décembre 2011 (P. ANDRIEU/AFP)  

 

Au-delà de cette affaire de slogan, force est de constater que le sujet vient de faire une entrée fracassante dans la campagne présidentielle. Tellement fracassante que la droite a sonné la charge pour expliquer à tout venant qu’ils étaient les géniteurs de l’idée. Et le président Sarkozy d’aller aujourd’hui prodiguer la bonne parole aux frais du contribuable pour financer sa campagne alors qu’il n’est pas officiellement candidat à Sallanches pour rendre visite à Rossignol qui a relocalisé ses usines. L’Elysée qui s’agace de voir François Bayrou faire de ce slogan son thème central de campagne, rappelant que l’UMP avait été précurseur. Il faut dire que l’on avait cru que le thème de la campagne à droite allait être l’immigration, le droit de vote des étrangers et la laïcité… Au temps pour nous. Il faut dire que Nicolas Sarkozy vient de découvrir qu’en parlant des véritables préoccupations des Français, on décrédibilise totalement les offensives frontistes avec des intentions de vote en berne pour Marine Le Pen. Il n’y avait pas encore pensé, le bougre !

 

La polémique est vaine de savoir qui est venu en premier, la poule ou l’œuf, et rappelons que François Bayrou avait déjà amplement exprimé son idée, bien avant l’annonce de sa candidature, dans son livre "2012 Etat d’Urgence", aux pages 86 et 87 pour ceux qui voudraient vérifier la source, dans lesquelles il est questions d’un "label "produit en France" (qui) dira au consommateur qu’il est engagé dans le produit, qu’il achète un peu pour lui-même, pour son emploi, ou pour l’emploi des siens, pour sa sécu et sa retraite", comme il existe pour le commerce équitable ou pour l'agriculture biologique, AB.

 

D’ailleurs, c’est assez amusant de constater qu’à l’époque, l’immense économiste Alain Minc, qui inspire tant notre cher président Sarkozy, avait cru y lire - au mépris d’ailleurs des titres mêmes des chapitres du livre, ce qui lui valut un soufflet cinglant du Béarnais qui rebaptisa son contradicteur de "méridianopète" - un "protectionnisme" déplacé, ajoutant : "On ne peut pas prendre le pouls de l'économie française en se désolant parce qu'une PME des Pyrénées-Atlantiques délocalise." Alors les larmes de crocodiles, que ne manquera pas de verser Nicolas Sarkozy aujourd’hui sur l’industrie française, font doucement sourire, surtout quand Minc est en général dans ce genre d’interview, télécommandée d’un poste assez proche de l’Elysée, suppose-t-on…

 

Plus grave, Minc avait mal vu, ce qui n'est pas, en soi, une surprise, mais en la matière il n'est pas le seul. Certains veulent voir dans la préconisation de François Bayrou un nationalisme exacerbé comme Les Verts, ou plus exactement l'équipe de campagne d'Eva Joly, puisque celle-ci s'est visiblement trop laissée aller à son goût sur le plateau de Canal Plus quand l'ancienne magistrate a exprimé tout son respect pour François Bayrou, un crime de lèse-majesté chez Les Verts où le sujet est on ne peut plus sensible. Il faut s'y habituer : chez Les Verts, la campagne est schizophrène. Toujours est-il que sur le "made in France", les écolos estiment que la proposition "acheter français" est nationaliste et rappelle trop "le slogan du PCF des années 1970". François Bayrou en digne héritier de Georges Marchais ! Il fallait oser !

 

Donner de l'emploi aux Français

 

On atteint tout de même des sommets de mauvaise foi de la part d’un parti qui fait feu de tout bois dès que l’on parle taxe carbone, et qui, par un réflexe pavlovien, est incapable de reconnaître une bonne idée, sous le prétexte qu’elle ne vient pas de son camp, quand bien même elle est écologiquement irréprochable…

 

En quoi favoriser l’emploi de nos entreprises françaises aurait des relents nationalistes ? Donner un emploi aux Français ne relèverait donc pas de la priorité des écologistes ? Encore un joli pan du programme des Verts qu’il faudra éclaircir… A moins qu’ils n’aient quelques difficultés avec la terminologie, mais ils ne semblent pas les mieux placés pour faire des leçons de morale en terme de démagogie du discours politique, semble-t-il…

 

Il semblerait d’ailleurs, au vu de l’emballement général sur la question et qui ne laisse personne indifférent, puisque les sondages se suivent et se ressemblent en montrant la remontée assez nette de François Bayrou alors qu’il en a fait un des piliers de sa campagne, que la confusion fût de mise.

 

On entend ainsi les critiques de ceux qui estiment qu’il est difficile dans un monde globalisé, où l’on achète la matière première dans un ou plusieurs pays, avant de profiter du savoir-faire d’un autre et de les assembler encore ailleurs, de savoir ce qui est français de ce qui ne l’est pas. C’est vrai. Mais telle n’est pas la proposition de François Bayrou.

 

Le problème n’est pas tant d’acheter des produits de marque française mais bel et bien d’acheter des produits qui offrent des emplois en France. Si vous achetez votre polo Lacoste qui est fabriqué en Chine vous n’apportez rien au bassin de l’emploi et à l’industrie française ! Vous apportez juste les 19,6% de TVA au budget, et une portion encore plus maigre au distributeur qui a embauché la vendeuse, voire l’hôtesse de caisse… En revanche, quand vous achetez une Toyota fabriquée à Valenciennes, vous achetez, certes une voiture japonaise, mais qui a été assemblée à Onnaing et qui a contribué donc à créer de l’emploi dans le secteur automobile. Et il me semble difficile ensuite de dire qu’en incitant à acheter une Toyota vous fassiez du quelconque nationalisme…

 

Le patriotisme économique

 

Voilà, pourquoi, également, les critiques de Marine Le Pen sont stériles quand elle affirma ce week-end lors de son meeting à Metz : "Comment François Bayrou ose, ne serait-ce qu'évoquer, la nécessité d'acheter français alors qu'il est un admirateur aveugle d'une construction européenne qui interdit le patriotisme économique, qui a tué la production française ?" La contre-vérité, telle que la présidente du Front national sait la manier pour faire prendre des vessies pour des lanternes. En quoi l’Europe interdirait-t-elle de sensibiliser le citoyen en l’informant que l’achat d’un produit favorise les emplois industriels de son pays ? Quelle étrange loi, quelle indicible article de la Constitution, quel chapitre incroyable du traité de Lisbonne empêche le citoyen d’être informé ?

 

En revanche, il est certain que la proposition de Marine Le Pen de taxer plus lourdement tous les produits qui ne viennent pas seulement de Chine mais aussi de l’Europe de l’Est, des droits de douane comme elle l’appelle, qui entrent en conflit total avec la Constitution européenne, et que seule une sortie de l’euro et de l’Europe s’avérerait nécessaire pour l’appliquer, ce qui ravira les deux tiers des entreprises françaises qui fonctionnent en import/export et qui se verront donc lourdement pénalisées, pour ne pas dire condamnées par un tel dispositif.

 

On le voit, le "made in France" prôné par Bayrou est au centre de toutes les préoccupations, chacun lorgnant sur la poussée du Béarnais dans les côtes de popularité où il retrouve des scores supérieurs à tous ses concurrents pour le premier tour de la présidentielle. De quoi presque créer un label "Made in Bayrou" à ses idées, histoire de ne pas le voir piller de ses ressources.

 

Et forcément, quand on se retrouve sur le devant de la scène, l’on se sait guetté. "Le Petit Journal" le sait bien et Yann Barthès a bien cru prendre à contre-pied François Bayrou hier soir en le montrant rentrer dans une voiture Audi, lui qui venait de préconiser d’acheter français.

 

Veuillez installer Flash Player pour lire la vidéo

 "Le Petit Journal" 12/12/11 - Profession journaliste

 

On passera sur la démonstration déjà faite qu’il ne s’agit pas tant d’acheter des produits de marque française que ceux qui produisent des emplois en France pour faire toute la lumière sur la contradiction qu’a cru dégotée le distributeur automatique de poil à gratter du PAF et qui a tant amusé la toile hier soir. En rappelant pour commencer que la voiture en question n’est pas celle de François Bayrou, mais celle d’un conseiller municipal de Pau. Pas de chance Monsieur Barthès. A moins que vous n’estimiez que lorsque l’on doit acheter français, on s’oblige aussi à n’emprunter que des voitures françaises.

 

Commencez alors par demander aux écolos de s’éclairer à la bougie et de communiquer en tam-tam, eux qui condamnent le nucléaire qui sert pourtant à éclairer leurs foyers, et les métaux rares utilisés dans les portables qu’ils utilisent pour twitter… Par ailleurs, pas de chance encore une fois, la voiture de François Bayrou est une Peugeot 3008 ! Et il s’en était fait l’écho lors d’une visite à Sochaux en avril dernier chez l’industriel français en question. Et lors de cette fameuse visite il était arrivé… en C5… Autre chose, Monsieur Barthès ?

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12 décembre 2011 1 12 /12 /décembre /2011 19:36

Il faut bien le dire, on avait trouvé le temps long. Démesurément long. Le MoDem est un jeune mouvement. Très jeune même, né des lauriers de la présidentielle 2007. La brise de l’été soufflait sur nos peaux encore bronzées, à l’heure où Seignosse n’était pas encore le décor d’une LipDaubedu plus mauvais goût, mais celle d’une Université de rentrée qui annonçait des lendemains qui chantent. A l’heure où nos espoirs étaient portés par près de sept millions de voix.

 

François Bayrou présente sa candidature pour 2012 le 7 décembre 2011 (CHAMUSSY/SIPA)

François Bayrou présente sa candidature pour 2012 le 7 décembre 2011 (CHAMUSSY/SIPA) 

 

A l’heure où les idéaux démocratiques se déclinaient devant nos yeux ébahis. Fi du clivage droite/gauche. Fi de l’opposition pavlovienne. Fi d’être le faire-valoir d’un seul parti. Le Mouvement Démocrate revêtait ses plus beaux habits. Souvenirs d’antan, Inconscience de nouveaux militants.

 

Quatre ans plus tard, bien des choses ont changé. Pas dans nos valeurs : l’idéal démocratique de nous voir travailler avec tous et de trouver des convergences sur certains sujets ne s’est nullement altéré et il n’est pas d’adhérents du MoDem sans volonté ardente qu’il en soit ainsi dans la politique moderne. Mais entre-temps, une épine s’est glissée sous notre pied. Et cette épine, c’est le bipartisme.

 

Satané tic pour une politique en toc qui vous marginalise. Vous avez raison, mais peu importe si vous n’êtes pas suivi. Et cela ne semble pas prêt de changer :

 

Bayrou a raison... mais bon... par snoopyves1

Avoir raison mais être seul. Un monde insensé où celui qui dit juste n’est qu’un fou tant qu’il n’est pas rallié, quand ceux qui sont bien entourés peuvent dire autant de vaines promesses et de fables qui hypnotisent. Toutefois, les temps ont changé. Bien changé même. Les médias nous avaient boudés Enfin, pas tous les médias. Les Guignols, le Petit Journal et Canteloup firent leurs choux gras à nos dépens. Pas envie de rire quand on a l’espoir de pourfendre le crétinisme bipartite de notre République et que l’on vous rit au nez sur le refrain d’un monde parallèle. Oui, c’est un peu comme si l’on vivait dans un autre monde. Qu’il fut dur d’être MoDem sous l’ère Sarkozyste.

 

Mais depuis quelques jours, depuis la déclaration de François Bayrou, depuis qu’enfin, les médias se savent de plus en plus contraints de respecter certains quotas, le ton a changé. Le Béarnais peut enfin parler de son programme, de ses idées et surtout de ses valeurs. Son chant est entonné partout, depuis le Conseil National du 27 novembre, jusqu’à sa déclaration de candidature officielle mercredi dernier jusqu’à "Des paroles et des actes" il y a cinq jours…  François Bayrou est revenu au centre.


Et force est de constater que sa traversée du désert n’a pas été vaine. Point de mirages ici, devant les témoignages appuyés de ses adversaires. Les mêmes qui le méprisaient, le dénigraient, voire le snobaient deviennent soudain respectueux pour ne pas dire amicaux. Le Roi et les courtisans entrent dans la danse.

 

La marquise Eva de Norvège lança la première valse, avec classe, se rappelant sans doute, non sans nostalgie, ses premières amours politiques :

 

Eva trouve Bayrou estimable Vidéo snoopyves1 sélectionnée dans Actualité

 

Puis ce fut le tour d’Arnaud, "de" Montebourg (particule pour la farce…) de se prêter en propos liminaires aux courtoisies de rigueur :

 

Arnaud Montebourg et l'estime à François par snoopyves1

 

Manuel Valls, lui rappelle que tout le PS aurait signé Abus de Pouvoir, tout en rappelant que le seul défaut de Bayrou est de ne pas être en équipe… Mais ne vaut-il pas être seul que mal entouré, Monsieur Valls ?

 

Valls aurait signé Abus de Pouvoir par snoopyves1

Entre temps, François de Hollande avait quant à lui adoubé notre preux chevalier dans sa majorité présidentielle… virtuelle.

 

Et la gouvernance en place de ne pas être en reste, et en bon souvenir de la traversée du désert, s’en allèrent pour une danse du ventre des plus caricaturales…

 

la danse du ventre de l'UMP par snoopyves1

Oui, mieux vaut en rire. Nul doute que si l’Alceste du Misanthrope observait la scène, il n’aurait d’autres mots envers eux que ceux qu’il lança à Philinte :

 

Je vous vois accabler un homme de caresses,

Et témoigner, pour lui, les dernières tendresses  (…)

Et quand je vous demande après, quel est cet homme,

À peine pouvez-vous dire comme il se nomme (…)

Et vous me le traitez, à moi, d’indifférent.

 

Mais point de Philinte chez François Bayrou. Car s’il est une chose dont on peut être sûr, et qui pourtant, ici ou là, point chez les plus aigris, c’est que François Bayrou ne se compromettra pas. Car que serait cette traversée en cavalier seul sur Rossinante, si c’était pour se vendre au premier moulin venu ? Qu’on se le dise, on vainc ou on périt mais on ne transige pas avec la vérité.

 

Bayrou l'incorruptible par snoopyves1

Alors les sondages ont frémi. Puis les commentateurs ont envisagé d’autres prédictions que celles communément admises par le bipartisme ambiant :

 

Apathie parie sur... Bayrou Vidéo snoopyves1 sélectionnée dans Actualité

 

Et si, en effet, la présidentielle n’était pas encore jouée ? C’est alors que certains, qui ne s’amusaient plus de voir Don Quichotte du Béarn s’émanciper de la sorte, décidèrent de s’en inspirer. Le piètre chevalier devint une muse. Borloo avait déjà senti le vent tourner, dès l’été, avant de partir en débandade. L’UMP s’en est rappelé à son bon souvenir…   

 

Hier, L2H pointait François Bayrou à 13%, avec 6 points de plus que le pointage effectué 3 semaines auparavant. Notre muse courtisée devient en un chiffre, un candidat redouté… Et ce n’est pas Marine Le Pen qui nous contredira, elle qui ajouta lors de son premier meeting, François Bayrou dans sa cible. La campagne est pour ainsi dire lancée.

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10 décembre 2011 6 10 /12 /décembre /2011 19:35

Et revoilà la bigote qui radote. Cette série est au Plus ce que "Martine" est à la littérature de jeunesse. Et je vous sais, lecteurs, impatients de savoir ce que recouvre ce nouvel opus. Dei.

 

Christine Boutin présente son programme lors d'une conférence de presse le 5 décembre 2011 (DUPUY FLORENT/SIPA)

Christine Boutin présente son programme lors d'une conférence de presse le 5 décembre 2011 (DUPUY FLORENT/SIPA).

 

Il faut dire que Madame Boutin a tout fait pour que l’on parle d’elle : elle a fait publier son projet pour 2012. Vous n’en avez pas entendu parler ? Je m’en doutais. Et comme Madame Boutin doit pester de se voir ainsi boutée hors du champ médiatique, elle qui apostropha déjà le CSA sur la primaire socialiste qui flouait, selon elle, la pluralité sur les chaines d’informations, magnanime, j’ai décidé de vous conter le programme de cette femme qui se présente pour la deuxième fois à la présidentielle (oui, le terme "seconde" paraitrait suspect, car il ne fait nul doute que Madame Boutin aura du mal à inverser une tendance assez prononcée à en croire les sondages…).

 

Mais Madame Boutin ne s’est pas contentée de décliner ses habituelles homélies pour établir son beau projet. Non. Elle a choisi d’établir une véritable stratégie politique en jouant de la surenchère avec un parti qui, lui, est placé dans le trio de tête depuis déjà plus de 6 mois : le Front national.

 

Il faut dire que cette tentative a une certaine logique. Contrairement à Nicolas Sarkozy qui siphonna l’électorat à grand coups d’immigration et d’insécurité, Christine Boutin possède un point commun avec le FN historique et non des moindres : l’électorat tradi de la branche ultra des catholiques.

 

Un programme qui fera la joie des ultra-catholiques

 

Longtemps hébergés au FN, ils se sont sentis exclus de ce parti dès lors que Marine Le Pen, moins encline à céder à leurs exigences en comparaison à l’époque où son papa faisait la part belle àBernard Antony, fut choisie pour représenter la flamme nationaliste. Et nul doute qu’ils eurent préféré voir à sa place celui qui s’est toujours montré indéfectible dans son soutien pour leur cause, Bruno Gollnisch. Ces quelques phrases lâchées après le congrès de Tours le 17 janvier dernier par Les Jeunes avec Gollnisch ont certainement fait apparaître une larme à l’œil de Madame Boutin… et une lueur d’espoir dans le cœur :

 

"Le discours présidentiel d’hier, en définissant la laïcité comme le confinement de la religion à la vie privée, s’interdit de rattacher la nation à des principes supérieurs. (…) Reléguer la religion à la vie privée, et ne vouloir lui conférer aucune expression publique, c’est renier 1500 d’histoire de France où le christianisme a pénétré notre civilisation, notre philosophie, notre calendrier, notre tissu social, nos traditions."

 

Et ces fameux jeunes avec Gollnisch d’ajouter :

 

"Cette conception de la laïcité, qui n’est pas une juste distinction entre le domaine temporel et le domaine spirituel, mais bien une séparation des deux sphères là où l’islam les confond toutes les deux, est donc, au même titre que l’Islam, contraire à l’âme et au génie français."

 

Alors que ces jeunes se rassurent : ils ont trouvé en Christine Boutin, celle qui défendra "leurs" valeurs. Et elle n’y va pas de main morte dans son projet pour 2012. Ainsi si elle réaffirme pour faire bonne figure le "respect intégral de la liberté religieuse et des lois de la République", l’ancienne ministre du gouvernement Fillon n’omet surtout pas de préciser juste après : "demander à l’État de faire respecter partout en France une saine laïcité, qui n’est pas le laïcisme, mais la distinction et la coexistence paisible de la raison et de la religion, dans la sphère publique comme dans la sphère privée."

 

Une nouvelle laïcité

 

Ah ! La "saine" laïcité ! Il ne manque qu’un "t" pour que l’adjectif ne fasse saigner les stigmates… Donc la saine laïcité serait celle qui assure la "coexistence paisible de la raison", comme par exemple l’empêchement de blasphémer ? Depuis quand la laïcité serait-elle malsaine en France ?

 

Christine Boutin donne une conférence de presse le 21 novembre 2011 à son QG de Levallois (WITT/SIPA)

Christine Boutin donne une conférence de presse le 21 novembre 2011 à son QG de Levallois (WITT/SIPA). 

 

Et cette "saine" laïcité, Christine Boutin n’a pas seulement vocation à ne l’imposer qu’en France. Elle voit plus loin. Elle qui fut pressentie pour être ambassadrice au Vatican, n’en a pas perdu pour autant le combat du Saint Siège : elle préconise ainsi de "porter une 'initiative citoyenne' au niveau européen qui permette à l’Union européenne d’affirmer clairement ses racines judéo-chrétiennes" et de "montrer ainsi que l’Europe n’est pas une terre en jachère, une terre de conquête pour des cultures qui ne partagent pas notre vision de la primauté de la personne humaine, de la liberté d’expression et de la démocratie."

 

La mesure mélangée au programme peut paraître inaperçue. Elle n’en demeure pas moins d’une dangerosité sans égale pour nos institutions laïques, reprenant à son compte la croisade lancée par le Vatican depuis plusieurs années déjà comme le révélait Caroline Fourest et Fiammetta Venner dès 2003, dans leur livre "Tirs croisés" (p. 323, collection Le Livre de Poche) :

 

A propos du Parlement européen, les auteurs expliquent que "même en l’absence d’un statut consultatif, le Vatican parvient (…) à se faire entendre. (…) Son lobbying le plus officiel se fait par la voix de la Comece, la Commission des épiscopats de la Communauté européenne. Le 7 février 1999, son secrétariat a demandé à ce que 'le rôle de la foi religieuse en tant que source et fondement de nos valeurs européennes communes soit reconnu dans la version finale du Traité Constitutionnel', prévu pour servir de corset idéologique à l’Union. La stratégie est habile. Au lieu de militer frontalement contre la laïcité, le Vatican choisit d’ouvrir une première brèche dans le traité de l’union en prônant la reconnaissance de l’héritage chrétien."

 

Anti-IVG et anti-PACS

 

On le voit, Christine Boutin entend tenir le bâton de pèlerin jusque Bruxelles. Mais il n’y a pas que la laïcité, et Sœur Boutin entend rappeler ses marottes : "protéger l’embryon" ce qui sous-entend lui conférer une existence, donc un statut légal. Ce qui revient de facto à faire des médecins, qui pratiquent l’IVG, et des mères, qui souhaitent avorter, des criminels. Et à remettre en cause une loi fondamentale que l’on doit à Simone Veil et qui offre aux femmes l’opportunité d’avoir un choix.Madame Boutin envisage d’imposer SON CHOIX, choix insufflé par la foi, à toutes les femmes.

 

Il faut dire qu’elle ne tergiverse pas avec la famille au point de rappeler ce que la loi prévoit déjà : "définir le mariage dans la Constitution comme "l’union d’un homme et d’une femme." Pourquoi réaffirmer ce qui existe déjà si ce n’est pour rappeler son combat hystérique contre toute reconnaissance du couple homosexuel ? Car il n’y a pas que le mariage gay qui est en question, mais aussi toute l’épopée qui accoucha, ca(h)in-caha au PACS, qui la vit brandir la Bible, la Bible !, au sein de l’Assemblée nationale.

 

Mais au-delà de cette complaisance envers l’électorat tradi ultra, pour ne pas dire intégriste, il y a bien d’autres échos que Christine Boutin fait aux électeurs du Front national puisque bon nombre de ses propositions reprennent celles que fait Marine le Pen : l’abolition du collège unique en termes d’éducation, l’augmentation du nombre de place en prison, du budget de la justice combiné au fait de "mettre fin à l’impunité en sanctionnant dès la première infraction et supprimer les aménagements de peine automatique". Le bâton n’est pas que celui du pèlerin comme on le voit.


Notons aussi la suppression du droit du sol, la suppression de la Halde (voilà qui ravira Eric Zemmour), la création d’un franc-euro à mi-chemin du "Franc Marine", rétablir la préférence communautaire pour les agriculteurs.

 

D’autres mesures, plus anecdotiques, sont également à l’identique comme l’abrogation de la loi Hadopi, la proportionnelle à l’assemblée (à hauteur de 100 sièges, ce qui n’est pas, loin s’en faux, la plus inepte de ses propositions), l’interdiction renouvelée de l’euthanasie, un encouragement très net à la fécondité sous la forme d’un "crédit temps parental" de 3h par couple et par semaine scolaire.

 

Une destruction assumée de l'Education nationale

 

Mais il y a plus grave, beaucoup plus grave dans le programme de Madame Boutin. Quelque chose que même le FN n’a plus dans son programme : le "chèque-éducation". Qu’est-ce que le chèque éducation ? Ce chèque permettrait notamment aux familles les plus défavorisées de placer leurs enfants dans l’établissement de leur choix. Sous-entendu, de pouvoir donc le placer dans une école… privée à moindre coût ! Marotte, quand tu nous tiens. Une véritable concurrence déloyale envers l’école publique qu’elle couple avec un assouplissement de la carte scolaire.

 

Madame Boutin ne nous promet pas seulement un laïcité "saine", l’interdiction de l’IVG ou encore une ombre inquiétante sur les couples homosexuels : elle propose la destruction assumée de l’Education Nationale. Elle qui ose dire dans son programme que transmettre est sa priorité... tout en reprenant, quasiment, point par point, les propositions de l’un des pourfendeurs les plus assumés de l’école publique à savoir SOS Education.

 

Elle qui assure, aussi, vouloir soutenir la langue française et la francophonie… Et comment pourrait-on la croire quand son équipe de campagne titre cette semaine au sujet de la réponse du CSA à sa plainte sur les primaires socialistes : "après que Christine Boutin ait adressé…" :

 

 

 

Fort heureusement, l’équipe a soudain relu son programme et s’est rappelé que la conjonctionaprès que imposait l’indicatif et non le subjonctif :

 

 

Bien évidemment ceci n’est que boutade. Boutade car il est certainement nécessaire de souffler après la vision d’horreur que nous venons de voir se décliner sous nos yeux.

 

Alors Madame Boutin pourra toujours se targuer de réserver une part belle aux BA, avec, dans le désordre, l’humanisation des prisons, la mise en place d’un revenu de base pour tous les citoyens y compris les mineurs (et encore en remplacement des allocations respectant les différences salariales, elles) la création d’un salaire maximum pour citer les plus notables.

 

Rien, pour autant, rien, ne pourra nous faire oublier la nocivité de ce projet qui est une attaque sans merci à la laïcité, une mise à mort de l’école publique, la remise en question de la libre disposition par les femmes de leur ventre, et surtout, oui, surtout, une course-poursuite malsaine avec le FN dans des dispositions les plus absurdes voire les plus nauséabondes.

 

Le conte touche à sa fin. Le Petit chapelet rouge ne va pas seulement parler avec le grand méchant loup : il essaye de prendre sa place. Et de dévorer la mère-grand République ! Je ne sais pas vous, mais moi, j’attends l’arrivée des bûcherons républicains avec impatience ! La messe est dite.

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8 décembre 2011 4 08 /12 /décembre /2011 19:35

Après une rentrée assez timide pourtant marquée par la sortie d’un livre qui posait les premières pierres de son projet présidentiel, François Bayrou est définitivement de retour. Aujourd’hui, son annonce de candidature, faite avec sobriété mais gravité, avait des relents d'un de Gaulle en 1958. Un lancement effectué avec la solennité nécessaire pour faire de cette campagne non une foire aux promesses mais une rencontre authentique avec les Français, sur la voie de la vérité.

 

François Bayrou lors de la présentation de sa candidature à la maison de la chimie le 7 décembre 2011 (J.DEMARTHON/AFP)

 François Bayrou lors de la présentation de sa candidature à la maison de la chimie le 7 décembre 2011 (J.DEMARTHON/AFP)

 

Longtemps assimilé à la danse du Centre, alors que lui-même avait dit que Borloo, Morin et De Villepin (puisque les medias se sont entêtés à placer au Centre le vilain petit canard de la planète Sarkozy) seraient autant de baudruches qui se dégonfleraient, il donne cette impression d’avoir été lucide, comme le rappelait Nicolas Domenach mercredi midi sur le plateau de la "Nouvelle édition"sur Canal + :

 

Bayrou visionnaire 

 

 

Mais comme c’est souvent le cas lorsqu’il rentre dans le vif du sujet, ses adversaires se rappellent à leur bon souvenir, histoire que le Béarnais ne tire pas trop la couverture à lui. Prenez les européennes par exemple. A l’époque, François Bayrou surfe sur le succès en librairie de son brûlot à l’encontre de la politique de Nicolas Sarkozy, "Abus de pouvoir". Le MoDem atteint alors14% d’intention de votes à deux semaines du scrutin. A tel point que Marc Vasseur, blogueur de gauche et ancien élu PS se laisse aller à un commentaire qui fera date :

 

"A 15 jours des européennes, je crois qu’on peut déjà pronostiquer un grand vainqueur, François Bayrou alors que paradoxalement lui-même n’est pas candidat pour le Parlement Européen. Et on aurait tort de croire qu’il s’agit d’un nouveau feu de paille, je pense qu’on est dans la continuité des présidentielles de 2007."

 

Pendant deux semaines, ses adversaires vont pourtant s’acharner, parfois l’attaquant à la limite de l’ad hominem

 

L'évangile selon Cohn Bendit  

 

Echec et mat. Le MoDem obtient seulement 8% des voix et entre véritablement de plain pied dans le désert qu’on lui avait promis deux ans auparavant.

 

La dictature du bipartisme

 

Cette fois-ci, il n’aura pas fallu attendre trop longtemps. Quelques jours après l’émission de TF1 où il rappela à tous ce qu’il avait déjà moult fois annoncé, à savoir qu’il allait annoncé sa candidature à la présidentielle, après les rappels paternalistes de Juppé ou les appels du pied sous la table de François Hollande et encore après deux sondages où sa hausse était confirmée (ici et ), les coups bas peuvent commencer.

 

Car l’attaque-t-on sur son programme ? Sur son analyse de la situation ? Sur sa lucidité et le caractère visionnaire que revêt sa campagne de 2007 ? Bien évidemment que non. Et quand les arguments de fond manquent, restent toujours les munitions rhétoriques qu’il faut cibler sur le seul point faible de François Bayrou : son positionnement politique.

 

Et si c’est un point faible ce n’est pas tant de son fait que de la faute d’une dictature de la pensée qui s’est imposée en France depuis la Vème République et de manière plus violente depuis la création de l’UMP en 2002 : le bipartisme.

 

Impossible d’être nuancé, d’avoir une position singulière, de proposer une troisième voie quand chacun de vos propos, aussi précis et rigoureux soient-ils sont conditionnés à la seule question qui semble passionner les médias : dans quel camp êtes-vous ? Le crétinisme bipartite dans toute sa splendeur.

 

Et mercredi matin, alors que François Bayrou préparait encore son annonce officielle, la contre-attaque se préparait en coulisse. Faire glisser François Bayrou sur la gauche ne suffisait pas ? Prétendre qu’il se vendrait au plus offrant pas davantage ? Qu’à cela ne tienne. Cette semaine, on dira que François Bayrou est de droite ! On entend souvent, assez béatement que l’on ne sait pas où François Bayrou se positionnemais il serait temps de savoir surtout où ses adversaires veulent bien le (dé)placer.

 

Dans les colonnes du "Monde", Nadine Morano lançait les premières hostilités en déclarant que François Bayrou faisait partie de sa famille politique. A la question de savoir s'il se trouvait toujours dans la majorité, Nadine Morano a répondu : "ça dépend des fois". "Il y a des fois où il nous soutient, il y a des fois où il est critique virulent, il y a des fois où il est un peu moins critique."

 

Mais allez expliquer à la clairvoyante et la si cultivée Madame Morano que personne ne détient la vérité absolue et que par la force des choses, parfois vous avez raison et on vous le dit, et parfois vous faites fausse route et on vous le dit aussi… Difficile d’élaborer une pensée rigoureuse quand le reflexe reptilien s’épanouit dans le manichéisme primaire.

 

Gauche ou droite ?

 

Dans la même inflexion, Christian Jacob, Président du groupe UMP à l’Assemblée Nationale, interrogé par des journalistes d’I>télé dans un reportage, et sommé de dire pour qui François Bayrou penchait, sortit un "ben d’après vous…" lourd de sous-entendus quand le commentaire précédent plaçait le curseur à droite. Bruno le Roux, député PS de Seine-Saint-Denis argumenta bien davantage : "Il a encore un centre de gravité qui penche beaucoup à droite. Il pourrait sur certains sujets de société se rapprocher de nous." Ah oui ? Sur les sujets de société ?

 

François Bayrou s’est prononcé pour l’homoparentalité. Il s’est déclaré pour le vote des étrangers aux élections locales. Il continue de vouloir un service public de qualité en refusant de continuer la sinistre suppression automatique des postes de l’Education Nationale organisée par la droite sans pour autant céder aux sirènes de la démagogie en promettant 60.000 postes. Faut-il donc qu’il se déclare pour la légalisation du cannabis pour espérer entendre qu’il penche davantage à gauche ?

 

On se souvient déjà qu’aux Journées de l’Espoir à gauche à l’été 2009, organisées à Marseille par Vincent Peillon, Marielle de Sarnez avait détonné en montant à la tribune ce qui fit dire à Patrick Menucci : "Finalement, il faudrait mettre Marielle de Sarnez à la place de Martine Aubry !"

 

Plus récemment, le sondage publié aujourd’hui même par BVA montre un François Bayrou à 9%. Plus intéressant encore pour notre propos, l’analyse des reports de voix montre que les électeurs qui choisiraient François Bayrou au 1er tour, seraient, au second, en cas d’un affrontement entre Hollande et Sarkozy, 52% à pencher pour le candidat PS, contre seulement 22% à choisir le candidat UMP et 26% à s’abstenir. Et l’on dira encore que la famille politique du MoDem et de François Bayrou penche à droite ?

 

Pour autant, il ne faudrait pas céder à un réflexe pavlovien. Et, bien au contraire, faire preuve de pédagogie puisque malgré les faits têtus, on continue de proposer des préjugés au lieu de distinguer les nuances. Car certains continuent de dire que, malgré toutes les bonnes intentions du Président du MoDem, il n’y a pas la place et il n’y aura pas assez d’hommes pour lui permettre de mener à bien son projet. Encore une fois malgré les preuves qui montrent tout le contraire. Plus dela moitié des Français déclarent ne faire confiance ni à la droite, ni à la gauche pour gouverner le pays

 

Un tiers refuse de se positionner sur un axe gauche-droite. Largement de quoi donc arriver au premier tour de l’élection présidentielle, voire d’être en position de force pour l’emporter. D’autant qu’en 2007, François Bayrou était donné gagnant en cas de deuxième tour aussi bien face à Nicolas Sarkozy que face à Ségolène Royal. Le plus dur reste donc d’atteindre ce fameux deuxième tour pour ne pas perdre le Nord.

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7 décembre 2011 3 07 /12 /décembre /2011 19:34

C’est un fait avéré et qui se vérifie après chaque catastrophe : les écolos reverdissent dès que plane le spectre de la peur. Peur d’un tsunami. Peur d’un tremblement de terre. Peur d’une explosion nucléaire. Avec un funeste appétit carnassier, sitôt les événements connus, ils défilent un par un et prônent la rhétorique terroriste de leur discours alarmiste. Tous aux abris, on va rafler des voix !

 

Le site nucléaire de Nogent-sur-Seine, le 5 décembre 2011 (FRANCOIS NASCIMBENI/AFP)

Le site nucléaire de Nogent-sur-Seine, le 5 décembre 2011 (FRANCOIS NASCIMBENI/AFP).

 

Déjà lors des événements de Fukushima, ils avaient inondé les plateaux pour tenter d’instrumentaliser politiquement la catastrophe. Et d’abreuver nos oreilles d’un discours catastrophiste qui en termes de manipulation est au moins aussi efficace que celui qu’il dénonce de la part des lobbys nucléaires. La sémantique du pire se décline et font leur miel.

 

Depuis deux jours, ils ont tous surfé sur la vague du tsunami crée par Greenpeace en s’en donnant presque à cœur joie. Sur Europe 1, Noël Mamère a tout simplement approuvé la démarche de Greenpeace qui pour lui fait la démonstration de ce que dénoncent les Verts depuis toujours : "Greenpeace a apporté la preuve que les centrales nucléaires ne sont pas sûres à 100%"…

 

La peur donc. Et le maire de Bègles d’approuver en outre la méthode de voyous utilisée : "Je ne peux pas avoir de réserves. J’ai été condamné par les tribunaux à 100.000 euros d’amende et trois mois de prison avec sursis pour avoir arraché un pied OGM. C’est donc un dangereux délinquant qui parle devant vous". Monsieur Mamère est surtout un élu de la République, le même qui fait des bras d’honneur dans l’Assemblée nationale tout en niant les faits. Une belle publicité pour la politique en effet.

 

Un adoucissement du discours

 

D’autres lui ont emboité le pas, comme Michèle Rivasi, la nouvelle porte-parole d’Eva Joly depuis les tumultes que l’on sait des semaines passées autour de l’accord passé avec le PS : "Même sans aller au cœur du réacteur, il suffit d'une simple grenade, une simple mini explosion pour entraîner une contamination sur le territoire. On voit bien la fragilité du système."

 

On le voit, quand on est Vert, on adoucit l’arme terroriste par un adjectif tendre, "une simple grenade", ou par un diminutif des plus gentillets "une simple mini explosion" (c'est-y pas mignon...), histoire d’asséner une rhétorique de la peur à l’artillerie lourde, allant jusqu’au scénario d’un blockbuster américain : "Mais peut-être que demain il y aura un piratage informatique qui montrera qu'on ne maîtrise plus la salle de contrôle... Ce sont des installations tellement à risque que l'on ne peut pas tout prévoir." Chez les Verts, on ne vous sert pas que du discours politique ; on vous vend du rêve en 3D !

 

Tous les coups sont donc permis. L’illégalité, et même la rhétorique du terrorisme pour créer un climat délétère et étouffant. Ce qui est tout de même assez ironique quand on sait que les mêmes Verts savent parfaitement dénoncer le discours de peur, avec pertinence pourtant, chez ceux qui agitent le drapeau rouge à propos de l’islam. Il y a des rhétoriques qu’il vaut mieux éviter pour éviter les amalgames douteux.

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6 décembre 2011 2 06 /12 /décembre /2011 19:33

Le temps est-il enfin venu de parler de programme pour cette campagne présidentielle ? Entre lesaccords de circonscriptions, les querelles des cumulards nantis et les affaires scabreuses qui n’en finissent plus d’entacher le quotidien de nos médias, il serait sans doute temps, à cinq mois d’une élection qui traditionnellement est celle qui mobilise et a fortiori intéresse une large majorité de Français. Alors François Bayrou arrive en campagne et parle programme. Pas des promesses. Une vision claire, nette sur l’avenir. Un discours de vérité.

 

François Bayrou lors de la présentation de son agenda politique 2012-2020 (L.BONAVENTURE/AFP)

 François Bayrou lors de la présentation de son agenda politique 2012-2020 le 30 novembre 2011 (L.BONAVENTURE/AFP)

 

Il faut bien dire que le Président du MoDem a une certaine légitimité. Pour se présenter. Mais pas seulement. Pour être le porteur d’un discours crédible. N’est-ce pas lui qui avait notamment articulé toute sa campagne 2007 autour de la dette et de la Crise à venir, ses principaux adversaires traitant celui qu’il considérait comme Cassandre avec condescendance, notamment sur sa volonté d’inscrire dans la Constitution l’impossibilité de proposer à l’Assemblée un budget déficitaire en temps normal ?

 

Cinq ans plus tard, Nicolas Sarkozy a essayé en vain de faire voter sa règle d’or à un PS qui s’y refuse en disant avec une grande maturité : "la dette, c’est pas nous, c’est eux". Enfantillage que de se quereller pour savoir qui est le coupable quand la seule question qui vaille en ces temps incertains c’est comment et quand on va s’en sortir.

 

La responsabilité des gouvernements à gauche et à droite

 

Pour François Bayrou, il n’y a d’ailleurs pas de vainqueurs dans ce faux débat : les gouvernements de gauche et de droite qui se sont succédés dans l’infernale cadence bipartite ont tous leur part de responsabilité dans leur incapacité à n’avoir pas pu anticiper la dette. Et c’est avec la lucidité de celui qui peut dire "je vous l’avais dit" que le Béarnais rentre en campagne. Non pas pour parader, car comme il le rappelle "tout était prévisible". Mais pour proposer la voie de la sagesse.

 

A mille lieues de la démagogie de ceux qui font des promesses intenables "prisonniers d’un programme et d’alliances qui ne peuvent pas répondre aux questions du pays".  De cela, François Bayrou parle au nom des Français : "Des promesses, les Français en ont leur compte. Ils veulent du crédible, pas des annonces sans lendemain où l'on oublie ce que l'on avait dit la veille !". A mille lieues aussi de ceux qui "annoncent une nouvelle loi sur la délinquance des mineurs la cinquième en cinq ans", en tentant de faire diversion sur la véritable impunité en France, quand la véritable impunité réside dans ceux qui créent le désordre et les inégalités sociales ! Des lois de diversions pour tenter de faire oublier la gabegie de la dernière lustre, et plus encore, si l’on remonte dans le temps. Une politique de l’émotionnel qui puise sa force dans l’énergie de la démagogie.

 

La politique par la raison

 

A la politique de l’émotionnel, il n’y a qu’une seule réponse, qu’une seule voie, qu’une seule sagesse : celles du rationnel. On ne gouverne pas pour flatter et pour sécher les larmes ou abreuver la colère. Ce n’est pas cela la justice.

 

Et l’idée d’une justice sociale commence par l’impôt. Et contrairement à Nicolas Sarkozy dont l’une des premières mesures fut l’établissement du bouclier fiscal, symbole de la société inégalitaire voulue par le locataire de l’Elysée, François Bayrou propose de relever l’actuelle tranche fixée à 41% pour la porter à 45% tout en créant une autre supplémentaire à 50%. Une manière de faire porter davantage l’effort sur les salaires les plus confortables et de faire taire ceux qui critiquent la proposition des 2 points de TVA supplémentaires qui permet de trouver de la liquidité immédiatement sans recourir à la dette qui devient abyssale.

 

Au-delà de la fiscalité, la grande proposition de François Bayrou est bien évidemment celle de la ré-industrialisation et notamment en incitant à acheter français. Une mesure qu’il a notamment détaillée dimanche soir au micro du Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro : "ce n’est pas un gros mot". L’expression est d’autant plus pertinente qu’elle rappelle qu’il est une nécessité que les grands partis républicains se réapproprient une certaine sémantique que les nationalistes ont fait leur durant les trois dernières décennies. Etre patriote, promouvoir le fruit de sa labeur, vanter la qualité de nos produit ce n’est pas une démarche de repli sur soi ; c’est une question de survie : "On est en train de crever, il faut inverser le mouvement et redonner envie d'acheter français, c'est une démarche civique."

 

Priorité à l'éducation

 

Dimanche soir, François Bayrou a évoqué d’autres sujets, comme celui qu’il estime prioritaire lui aussi : l'éducation. En proposant une politique tout autre que celle proposée par la droite et la gauche : la première prônant la réduction toujours plus massive de la masse enseignante ; la seconde promettant monts et merveilles et surtout avec la création de 60.000 postes sur un quinquennat, soit une dépense supplémentaire de 7,5 milliards d’euros juste sur la période (car il ne faut pas oublier qu’un poste d’enseignant n’est pas un CDD de 5 ans…). Tout cela est déraisonnable en ces temps d’économie budgétaire, pour ne pas dire mensonger, surtout quand, dans le même temps, on promet "en contrepartie" la transformation du métier d’enseignant.

 

Entendez donc, les professeurs travailleront davantage. Et, si et seulement si, il y a de l’argent, on pourra embaucher voire augmenter les salaires en conséquence. Encore une fois, entre la casse et la démagogie, François Bayrou s’engage dans la voie de la vérité et de la sagesse : cesser l’infernale diminution des fonctionnaires au rythme du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux dans des secteurs prioritaires, et l’éducation est de ceux-là, et des réformes qui se voudront avant tout pédagogiques. Car il serait temps de comprendre que les maux de l’école ne se résument pas à des questions de moyens. En nivelant l’exigence de nos élèves, la France a asséché son réservoir. Il est grand temps de rectifier le tir.

 

Bayrou n'est pas seul

 

Reste la question que tout le monde se pose : comment François Bayrou pourra-t-il procéder puisqu’il est seul ? Tout d’abord, le Béarnais n’est pas seul, et Jean-François Kahn vient de rappeler à tout le monde qu’était en train de réunir autour de lui des femmes et des hommes qui veulent croire en autre chose qu’en ce crétinisme bipartite qui gangrène notre vie politique. Et puis les tractations de ces derniers jours, entre un Hollande qui lui promet une place dans la majorité présidentielle s’il appelle à voter pour le PS au second tour, et Alain Juppé qui lui demande de ne pas se tromper de famille.

 

Des coups de pieds sous la table électorale qui font sourire et qui rappellent que, dans le bipartisme, les bonnes vieilles méthodes sévissent toujours, non sans vices. Envers et contre tous. Jamais ensemble.

 

Triste destinée que ces politiques qui n’ont pas compris que la logique partisane perd de son intérêt dès lors que le pays est en état de crise. Ce ne sont là que querelles de temps prospères. Point d’égo quand le pays demande à tous les Français de rassembler forces et idées pour avancer ensemble. La fameuse Union centrale, et non centriste, comme a tenu à le rappeler dimanche soir François Bayrou : "parce que centriste ça signifie ni-ni".

 

Réunir

 

Qu’on se le dise, ce n’est pas en sa qualité de Président du MoDem que François Bayrou se présente aux Français. Non, c’est la volonté de faire travailler les Français ensemble qui l’anime. Et les militants du MoDem sont parfaitement prêts à l’accepter comme nous l’avons validé en Conseil National samedi dernier à Paris.

 

Je serais curieux de voir combien de militants d’autres partis ou d’autres mouvements seraient prêts à en faire autant quand on voit par exemple Madame Danièle Hoffman-Rispal devenir tout rouge quand on lui demande de faire place à Cécile Duflot. Certains oublient que les mandats ne sont ni des CDI, ni une rente à vie, ni un dû, mais une confiance que les électeurs daignent leur accorder pour être au service des Français. 

 

Une seule priorité : réunir. De la droite républicaine à la gauche réformisteUne majorité de Français n’ont confiance ni en la gauche ni en la droite et la perspective de l’union nationale pourrait donc les séduire. Reste à la concrétiser dans les urnes. Pour ne plus jamais entendre le discours poujadiste du "tous les mêmes", alors que justement il y a encore des choses que l’on a pas essayées. Et le discours du "construire ensemble" sera toujours plus rassembleur que celui du tout détruire, les uns contre les autres, comme d’autres le proposent.

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30 novembre 2011 3 30 /11 /novembre /2011 21:58

Premier volet de ma chronique sur www.133b.fr, avec pour sujet Charlie Hebdo et les caricaturistes.

 

 

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29 novembre 2011 2 29 /11 /novembre /2011 19:33

Il y en a pour qui ce n’est pas une surprise. Mais il y en d’autres qui avaient espéré mieux, sans doute sous la forme d’une annonce à l’issue d’une émission crochet comme "Masterchef" pour faire son annonce présidentielle. Quoi qu’il en soit, c’est chose faite : Hervé Morin s’est officiellement déclaré candidat à l’élection présidentielle.

 

Hervé Morin à Belleville-sur-Mer le 27 novembre 2011 pour l'annonce de sa candidature (K. TRIBOUILLARD/AFP)

 Hervé Morin à Belleville-sur-Mer le 27 novembre 2011 pour l'annonce de sa candidature (K. TRIBOUILLARD/AFP)

 

Un de plus. Qui s’ajoute aux candidatures qui ont été confirmées et à celles qui sont probables : Nicolas Sarkozy, Philippe Poutou, Nathalie Artaud, Corinne Lepage, François Hollande, Marine Le Pen, Jean-Pierre Chevènement, Eva Joly et François Bayou. Sans compter les candidatures fantaisistes qui tentent de se faire un nom ou pire encore de donner des coups de boutoirs ostentatoires à notre laïcité que certains voudraient ouverte à défaut d’être vacillante.

 

De nombreux candidats, comme en 2002 ?

 

Seront-ils aussi nombreux à briguer le poste suprême au 22 avril 2012 ? Certainement pas. Entre ceux qui sont lâchés en rase campagne par leur parti, ceux qui peineront à récolter les 500 parrainages (et Marine Le Pen ment quand elle prétend qu’elle fait partie de ceux-là), ceux qui négocieront un maroquin et ceux qui se décourageront faute de soutiens, il risque d’y avoir quelques pertes et il y a fort à parier (et à souhaiter !) que l’on atteindra pas le chiffre mirobolant de 2002 qui avait vu s’affronter seize candidats.

 

D’où cette question : la candidature d’Hervé Morin résistera-t-elle mieux qu’une autre à cet écrémage ?

 

Pour en débattre, il convient de l’analyser selon les trois critères qui participent activement à la réussite d’un candidat : sa propension à être soutenu et à rassembler, une ligne politique claire et singulière, et un programme proposant des idées neuves ou pour le moins qui chantent à l’oreille des Français.

 

Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la candidature d’Hervé Morin n’est pas le fruit d’un rassemblement sans équivoque autour de sa personne. S’opposant à Jean-Louis Borloo pour incarner une certaine idée du Centre (et nous reviendrons plus loin sur ce qu’il en retourne concrètement), il a vu sa voie se libérer dès lors que l’ancien maire de Valenciennes prit son petit monde à contrepied en annonçant qu’il jetait l’éponge. Aujourd’hui, Hervé Morin peut tout de mêmerevendiquer 17 parlementaires soutenant son initiative. C’est peu pour un parti comptant 23 députés à l’Assemblée Nationale, 3 à Strasbourg et 12 sénateurs.

 

Une faible marge de manoeuvre

 

Le moins que l’on puisse dire c’est que le président du Nouveau Centre ne fait pas véritablement recette y compris au sein de sa famille politique. Ce qui laisse présager le pire, à en croire Emmanuel Rivière, le directeur du département stratégie d'opinions TNS-Sofres, qui tente d’analyser la marge de progression possible dans les intentions de vote :

 

"Et bien on peut rester là. On a vu des candidatures portées avec parfois plus d'évidence que le Nouveau Centre porte aujourd'hui Hervé Morin rester à 1%. C'était le cas de Dominique Voynet en 2007. Le risque c'est d'être de moins en moins soutenu. Pour percer il faut créer un évènement. Et surtout il faudra faire campagne avec dans son dos un soutien très mitigé voire une absence de soutien."

 

Un manque de soutien donc qui annonce des lendemains qui déchantent. D’autant que pour réunir au-delà de sa famille politique encore dût-il proposer une "troisième voie" comme il l’annonça dimanche dernier, non sans plagier la campagne d’un certain François Bayrou en 2007 qu’il… anima à ses côtés… Mais quel crédit apporter à cette promesse quand on sait dans quel prisme s’inscrit la candidature d’Hervé Morin : le Nouveau Centre ne peut s’allier qu’avec la Droite et ne pourra choisir au deuxième tour que Nicolas Sarkozy.

 

En quoi est-ce ici l’expression d’une troisième voie ?

 

Où se trouve la singularité, quand on retrouve, dans cette vision, le centre hémiplégique qui a sévi à compter des années VGE et ce jusqu’à la rupture du Congrès de Lyon de 2006, qui marqua, par la grâce de François Bayrou, le retour à un Centre étymologique, à savoir un Centre indépendant ? Et même si Hervé Morin a tenu à marteler ses distances avec le chef de l’Etat, qui peut oublier qu’il a été son ministre de la Défense pendant plus de la moitié de son quinquennat ? Cela ne suffit-il pas à dire qu’il partage tout ou partie de ces valeurs dont les Français ne veulent plus ?

 

En prônant un centre inféodé à la droite, comme cela fut la sinistre tradition pendant plus de trente ans, Hervé Morin ne propose aucune ligne politique cohérente et sincère s’il la présente comme novatrice et différente de celle du pouvoir actuel. Au mieux il se méprend, victime du crétinisme bipartite, au pire, il prend les électeurs pour des andouilles. Avec Morin, ce n’est plus la France qui conserve son triple A, c’est la France AAAAA.

 

Et la mascarade est encore plus belle avec le programme qu’il décline en douze points, inopportunément dénommées "idées neuves". Passage aux 37 heures, moins de vacances pour les élèves (et pour les professeurs cela va sans dire…), exonération de 100% des charges sociales aux entreprises pendant un an si elles embauchent des jeunes pour au moins un an. Voilà qui va assurément séduire au-delà de la droite.

 

Mais le pompon reste tout de même la troisième idée neuve, sobrement intitulée "interdire le cumul des mandats et des fonctions", qu’il convient de citer dans son intégralité :

 

"Les conflits d’intérêt et les délits politico-financiers minent notre démocratie. Parce que les élus doivent être les premiers à donner l’exemple, la morale et l’honnêteté imposent l’inéligibilité à vie des élus condamnés pour corruption."

 

Et l’idée de se poursuivre :

 

"Les Français n’acceptent plus le cumul des mandats qui confisque le pouvoir entre les mains de quelques-uns alors qu’une démocratie moderne doit plus que jamais reposer sur le renouvellement de ses élus et leur rajeunissement. Interdire le cumul des mandats et des fonctions, c’est aussi indispensable pour enfin atteindre la parité et faire entrer la diversité en politique."

 

Mais de qui se moque-t-on ? Monsieur Morin qui continue d’avoir une vision hémiplégique du monde politique qui se complait dans une alternative stérile et qui refuse la proportionnelle sous le fallacieux prétexte de barrer la route au Front National, (ce qui n'empêcha pas ce dernier de battre la droite aux dernières cantonales comme un avertissement aux futures législatives…) vient faire des leçons de morales sur le conduite des hommes politiques ?

 

Lui qui a financé son parti par une fusion artificielle avec un parti tahitien afin de contourner la loi de financement des partis politiques ? Lui qui a profité de cette règle injuste au point d’avoir un groupe parlementaire à l’Assemblée en rassemblant seulement 2% des voix aux législatives ? Lui qui pour s’assurer de la réussite maximale aux dernières législatives s’adonne au népotisme le plus ostentatoire avec un cynisme propre à vous dégouter de la politique ?

 


 

Lui qui ment en prétendant n’avoir jamais rencontré les officiels des Emirats Arabes Unis ce qui fait planer un sérieux doute sur le conflit d’intérêt qui semble le concerner à propos de la vente d’un de ses purs sangs ? Lui qui, en pleine affaire Karachi, en profita pour assommer son ancien compagnon de route de manière assez sournoise ?

 

Hervé Morin n’est assurément pas le candidat du Centre

 

Il n’est qu’un Tartuffe chez les faux-centristes. Qui propose donc sa candidature. Une candidature à l'élection présidentielle. Sans réel programme. Et qui postule à un portefeuille. Et à des circonscriptions. Une mode écolo en ce moment. Mais surtout, lui surtout qui fait campagne… pour la victoire de Nicolas Sarkozy, on l’aura bien compris.  Et la question de savoir s’il maintiendra ou non sa candidature résultera de la position de son favori face à la probabilité d’un 21 avril à l’envers.

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28 novembre 2011 1 28 /11 /novembre /2011 19:32

Ce week-end, tous les médias l’annoncent : au Maroc, les élections ont vu la  victoire des islamistes modérés. Les même qui annonçaient leur victoire en Tunisie, ou leur programme en Libye.

 

Abdelilah Benkirane, secrétaire général du parti de la justice et du développement se réjouit des résultats aux législatives à Rabat le 27 novembre 2011 (A. SENNA/AFP)

 Abdelilah Benkirane, secrétaire général du PJD se réjouit des résultats aux législatives à Rabat le 27 novembre 2011 (A. SENNA/AFP)

 

N’y aurait-il pas comme un malaise en Occident au point d’user et d’abuser, en guise de méthode Coué, d’un oxymore pour évoquer la victoire de parti politique dont l’essence même est la religion ? Cette stupeur fut d’ailleurs à l’origine du si sulfureux "Charia Hebdo" comme en atteste l’édito de Mahomet, voix transmise par prosopopée, qui déclarait sans rire : "Quel intérêt aurait un parti religieux à prendre le pouvoir pour ne pas appliquer ses idées ?"

 

Est-il nécessaire de redéfinir l’islamisme ? Le Robert dit : "Mouvement politique ou religieux prônant l’expansion ou le respect de l’islam". Autrement dit, mouvement qui agit pour le prosélytisme ("expansion") ou la charia ("respect de l’islam"). Alors il est temps de rétablir une vérité. Non, il n’existe pas d’islamisme modéré, pas plus qu'il n’existe d’islamistes modérés.

 

Si l’on entend par modération le bannissement de traditions archaïques qui peinent à trouver leur justification dans les textes sacrés à moins de les déformer comme l’excision ou la polygamie, alors on se trompe. Nous ne sommes pas dans la modération, mais dans la disparition de la barbarie.

 

Démocratie et sécularisation


L’islamisme, c’est l’instrumentalisation du religieux à des fins politiques. C’est l’utilisation de la croyance afin de s’accaparer le pouvoir. Le Coran a son pendant du "rendons à César" de la Bible : il s’agit du verset 38 de la sourate 42 qui recommande de "laisser les hommes délibérer entre eux de leurs affaires". Ceux qui respectent cette fatwa sont des Musulmans. Ceux qui ne la respectent pas sont islamistes et profanes. Ils n’ont rien à voir avec la religion.

 

Que ce soit bien clair : les démocraties ne s’accommodent pas du pouvoir religieux. Toute démocratie qui laisse entrer en son sein la matière religieuse comme commandement ou comme ligne directrice perd de sa nature profonde et ouvre la porte à la dictature. Rappelons nous l’histoire de l’Iran, si parfaitement résumée par Marjane Satrapi dans "Persepolis" : les Iraniens croyaient s’être débarrassés du Schah… Ils ont hérité de la terreur islamiste. Une dictature en a remplacé une autre.

 

Et ceux qui, trop hâtifs, penseraient que cela ne concerne que les pays arabes se trompent lourdement : que dire des Etats-Unis qui mirent à sa tête Georges Bush Jr., qui milita pour le lobby créationniste au point de placer un Provie à la Cour Suprême propre à remettre en question l’IVG aux Etats-Unis? Que dire d’Israël qui au nom de fanatiques religieux pratiquent une politique indigne envers la Palestine ? Que dire de Christine Boutin qui a brandi la Bible dans l’Assemblée Nationale et qui continue à vouloir inscrire dans les préceptes religieux dans la Constitution ?

 

Non, nul n’est à l’abri. La démocratie ne peut s’épanouir que dans la sécularisation. L’islamisme modéré n’existe pas. Et il serait temps de s’inquiéter de voir les religieux s’emparer des failles de la démocratie pour s’imposer de la sorte. Les Tartuffe ont le vent en poupe. Il faut lutter. Et l’arme de la démocratie reste l’information. Ne laissons pas notre journalisme céder à une cécité angélique.

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Présentation

  • : Les Nouveaux Démocrates
  • : Enseignant et essayiste. Auteur de La Croix et la bannière sur la rhétorique des intégristes à propos du mariage pour tous (Golias, novembre 2012) et de Mariage pour tous vs Manif pour Tous (Golias, mai 2015) Auteur également d'articles sur Prochoix, la revue tenue par Fiammetta Venner et Caroline Fourest (n°57,58,59, 63 & 66) Ancien membre du Conseil national du MoDem et candidat aux Régionales 2010 et législatives 2012. Démission du MoDem en octobre 2012. Blog d’un militant du Mouvement Démocrate (MoDem).
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