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31 janvier 2012 2 31 /01 /janvier /2012 20:14

Un nouvel appel à la grève a été lancé pour cette journée de mardi auprès des enseignants, et tout particulièrement du secondaire. La raison de la grogne ? Une réforme qui vise l’évaluation des enseignants, et l’éternelle question des suppressions de postes.

 

Non, l'éducation n'est pas qu'une question de moyens


Concernant les suppressions de postes, tout a déjà été dit ou presque. La France se complaît dans la caricature pour aborder ce thème, avec d’un côté, un "enfant barbare" qui ne cesse de casser l’école et de dépecer la mammouth jusqu’à l’os, et de l’autre une gauche qui se conduit en parent désinvolte, offrant des cadeaux pour compenser le manque d’affection à l’égard de ses enfants… avec la carte de crédit revolving, qui puise dans cet abîme que l’on nomme la dette.

 

Grève des enseignants, 15 décembre 2012, Paris (SEVGI/SIPA)

Grève des enseignants, 15 décembre 2012, Paris (SEVGI/SIPA)

 

Quand on vient à dire que la question éducative n’est pas qu’une question de moyens, on vous conspue et on vous classe irrémédiablement à droite, parmi les pourfendeurs de notre école.

 

Quand vous expliquez que les suppressions actuelles dépassent largement les logiques arithmétiques de la démographie, on vous taxe de communo-socialo gauchiste qui refuse d’évoluer et de s’adapter dans son temps.


Qu’il est beau le spectacle pathétique du bipartisme. Mais si les réponses de la France s’inscrivaient dans la certitude de la caricature, pensez-vous que nous resterions si longtemps dans la crise, crise de l’école, s’entend ? S’il y avait une solution miracle qui tienne à la fois à la réussite des élèves, à leur insertion dans la vie professionnelle dès lors qu’ils ont un diplôme en poche, tout en garantissant des classes aux effectifs adaptés et des concours de recrutement qui feraient la part belle aux jeunes aspirants, ne pensez-vous pas qu’elle aurait déjà été pour le moins esquissée ?

 

Faire grève ce mardi, c'est cautionner le prétexte du "manque de moyens"


Mais la nuance est ici impossible. Inaudible. Comme pestiférée. Alors on se sclérose dans la caricature. On défile et on braille, alors que l’on sait que l’on n’obtiendra pas davantage. Et on supprime des postes à la pelle en sachant très bien que les économies ainsi réalisées sont infinitésimales (500 millions d'euros, soit 0,5% de la dette, dixit François Bayrou dans "2012 Etat d'Urgence")  à l’égard de la dégradation des conditions d’enseignement qui, elle, est exponentielle.


Alors oui, je m’oppose fermement à cette politique de la terre brûlée de l’Education Nationale, qui nous envoie droit dans le mur et qui fait tout pour satisfaire ceux qui souhaiterait voir la privatisation du système. Ou pour le moins, un système à deux vitesses, avec l’école publique pour ceux qui n’ont pas les moyens, et l’école privée pour ceux qui en ont, à l’image de l’inégalitaire Amérique si chère au cœur de notre Président.


Mais non, je ne souhaite pas faire grève pour apporter une caution à ceux qui font des moyens et des créations de postes une idéologie propre à subvenir à nos difficultés sur le terrain, qui sont avant tout pédagogiques, suite aux nombreuses inflexions mortifères qui ont eu pour père Jospin et pour Dieu Mérieu.

 

Évaluation des enseignants : l'hypocrisie de l'ancienneté


Concernant l’évaluation des enseignants, le sujet est moins compris par la population et les médias, mais ne s’épargne pas non plus les affres de la caricature. Et des plus abêtissantes qui soient.

 

D’un côté, vous avez un système inique, qui fait qu’un enseignant est évalué trois à quatre fois dans toute sa carrière, à raison d’une heure de cours à chaque fois et qui évolue, non pas au nom de ce qu’il a accompli ou de ce qu’il maîtrise, mais parce que le temps a passé. L’échelon se mesure à l’aune de l’ancienneté.


De l’autre côté, on nous propose un système dans lequel le principal ou le proviseur, qui évalue déjà les compétences administratives de l’enseignant, sera amené à apprécier sa pédagogie. Comme si un ancien CPE ou un ancien professeur d’EPS était à même d’évaluer la pédagogie d’un professeur de lettres ou de SVT ! Le grand n’importe quoi succède à l’injustice, et chacun reste bêtement sur ses positions.  


Alors oui, je m’oppose fermement à cette réforme ubuesque, qui ferait du principal un charcutier à qui l’on demanderait de juger la pâtisserie d’un buffet.


Mais non, je ne ferai pas grève, aux côtés de ceux qui continuent à refuser l’évolution de l’évaluation des enseignants, non pas pour les classer et opérer une méprisante concurrence entre les établissements, mais ne serait-ce que pour repérer les meilleures méthodes et assurer un formation plus digne que celle qu’a détruite le gouvernement en place.

 

Dans l'Éducation nationale, la grève ne sert plus à rien


Les grèves dans l’éducation nationale, même si la glose populiste, si généreuse dans les JT de Jean-Pierre Pernault,  les augmente bien plus qu’elles ne le sont en réalité, n’apportent plus rien au débat. Le dialogue est rompu. Et la responsabilité est pleinement partagée entre ceux qui refusent de débattre et d’entendre parler d’évolution, et ceux qui amènent des réformes toutes prêtes avant même d’avoir été débattues.


Des professeurs veulent lutter contre la suppression des postes ? Qu’ils refusent les heures supplémentaires qu’immanquablement on leur collera dans leur emploi du temps, puisque la loi n’oblige les enseignants à n’en accepter qu’une seule, et qu’ils partagent leur désarroi avec les parents d’élèves, car il n’y a que des actions organisées, main dans la main qui peuvent aboutir à de réelles avancées ! Pas des initiatives corporatistes qui se retrouvent gangrener par des intérêts personnels quand seuls les intérêts communs, ceux de la Nation devraient prévaloir.


D’autres s’indignent de leur évaluation par leurs principaux ? Qu’il refusent de signer, TOUS, leur note administrative dans quelques jours puisqu’aucun texte ne nous impose de le faire.


Mais surtout, surtout, qu’ils en appellent à nos femmes et hommes politiques de s’intéresser au cas de l’Education Nationale, car au-delà des querelles de corporations, c’est de l’avenir de la Nation qu’il est question. S’engager ainsi en politique reste le meilleur moyen de lutter. Non pas pour "préserver" des acquis. Mais pour évoluer ensemble.

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Présentation

  • : Les Nouveaux Démocrates
  • : Enseignant et essayiste. Auteur de La Croix et la bannière sur la rhétorique des intégristes à propos du mariage pour tous (Golias, novembre 2012) et de Mariage pour tous vs Manif pour Tous (Golias, mai 2015) Auteur également d'articles sur Prochoix, la revue tenue par Fiammetta Venner et Caroline Fourest (n°57,58,59, 63 & 66) Ancien membre du Conseil national du MoDem et candidat aux Régionales 2010 et législatives 2012. Démission du MoDem en octobre 2012. Blog d’un militant du Mouvement Démocrate (MoDem).
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