Cela devient irrespirable. 2013 nous avait déjà réservé la résurgence médiatique de l’extrême droite, étant entendu qu’elle n’avait jamais disparu. 2014 semble partir à un rythme encore plus effréné. Les semaines se suivent et se ressemblent. Après l’affaire Dieudonné, celle de la « théorie du genre » qui serait enseignée à l’école publique… Et à chaque fois, l’ombre tutélaire d’un Alain Soral, au zénith de sa médiocrité.
Farida Belghoul, auteur présumée de la diffusion des SMS auprès des familles pour les effrayer, vient des mouvements antiracistes. Comme Dieudonné. Comme les Indigènes de la République. Il faudra un jour s’interroger clairement sur les parois poreuses et paradoxales entre l’extrême droite et une frange des mouvements qui combattent la xénophobie. Et surtout sur l’aveuglement de certains qui refusent de voir qu’au-delà des bons sentiments s’en terrent d’autres, plus pernicieux, qui flattent le communautarisme et utilisent l’intégrisme pour tester la République.
Mais le dire provoque déjà tant de lever de boucliers et tant d’anathèmes…
Au-delà de ce phénomène inquiétant, Il faudrait aussi veiller à ne pas déresponsabiliser les citoyens. De la même manière que les politiques « comprennent » l’exaspération de ceux qui finissent par glisser un bulletin FN dans l’urne, la tentation est forte de croire que ces familles ont été manipulées. Que leur crédulité les a donc poussés à accepter ce boycott de l’école républicaine. Ce serait trop simple.
Les familles qui prennent la responsabilité de boycotter l’école ne sont pas seulement naïves : elles insultent la République et ses principes. En laissant entendre que les enseignants pourraient être suffisamment dérangés pour apprendre aux enfants à se masturber ou encore à avoir des cours de sexualité avec des pratiques.
La vérité, c’est que les familles concernées, et ce n’est pas un hasard, font partie majoritairement de réseaux communautaristes dans lesquels l’opprobre sur la République est une permanence. Et reviennent encore une fois ces pulsions intégristes qui veulent substituer la loi par la foi.
Et peu importe alors l’identité du culte : les intégristes de tous poils seront toujours prêts à mettre les différends religieux dans leur poche dès lors que César s’incline devant Dieu. A Bruxelles, on voit ainsi les membres de l’UOIE copiner de bonne grâce avec les lobbys envoyés par le Vatican, dès lors qu’il faut s’opposer à l’IVG ou encore à l’ouverture des droits LGBT.
La vérité c’est que la théorie du genre n’existe pas. Les études, elles, oui. Et l’école n’a nulle vocation à les intégrer dans ses programmes scolaires, sauf au lycée pour les évoquer, et ainsi contribuer à une réflexion à un âge où la raison s’émancipe. En revanche, elle a à cœur, et c’est son rôle, de mettre à bas la pensée patriarcale, qui, malgré les lois sur la parité, continue de dominer sur les esprits.
La question sur le genre à l’école ne parle aucunement de sexualité… Et les plus pudibonds devront sans doute s’interroger sur la nature profonde de leurs fantasmes…
N’en déplaise à certains obtus, une fille n’a pas forcément des couettes, vêtue de rose, une poupée à la main, la préservant jalousement du petit voisin, la salopette bleue, qui veut la détruire avec son GI Joe.
C’est le rôle de la République de démonter les clichés, responsables de tant de souffrance tant sociales que psychologiques, et de faire de l’égalité, non pas seulement le pilier central de notre devise, mais le pilier central de nos existences. Nier cette volonté, c’est nier nos valeurs, remettre en cause nos fondamentaux et, en somme, être un opposant revendiqué de la République.